Décrétée comme la fête de la convivialité et de la famille avec le cadre qui accompagne, Noël fait rêver les petits et les grands. Enfin pas tous les grands. Pour certains, Noël n’a plus rien d’une parenthèse enchantée, c’est devenu une angoisse redoutée chaque année.
Les raisons d’un désenchantement
La famille
Noël c’est avant tout une fête familiale où l’on retrouve les siens. En effet, parents, frères, sœurs et la ribambelle de neveux et nièces se retrouvent naturellement dans la joie et la bonne humeur quand tout le monde s’entend bien et a trouvé sa place.
Or, comme l’expérience nous l’apprend, on n’est pas toujours bien avec sa famille. Ce malaise peut provenir de blessures anciennes qui se réveilleront à Noël ou de conflits plus récents . Mais quelle que soit la nature de ces tensions (rancœurs, blessures, non-dits), il faudra ne rien en dire. Car l’importance est de réussir la fête, non de consolider les liens entre les membres de la famille. On est dans le paraître et l’hypocrisie, et cela tue l’esprit Noël.
Par ailleurs, rappelons que tout le monde n’a pas de famille, certains sont en dispute, d’autre n’ont pas de parents ou pas d’enfants. Le quotidien ordinaire leur fait oublier leur solitude. Noël la leur rappelle.
Enfin, pour beaucoup de divorcés, Noël est vécu comme une source d’humiliation. Leurs enfants sont avec les parents de leur ex-compagnon/compagne, tandis qu’eux sont coincés chez leurs propres parents, au milieu des couples heureux et de leurs frères et sœurs.
Le caractère commercial
En se penchant sur l’histoire du Père Noël, on y apprend qu’aujourd’hui la vraie fête de Noël concerne avant tout les grandes surfaces et la sacro-sainte Consommation. Ce qui a de quoi nous rendre cyniques, car là encore on trahit l’esprit de Noël.
Où sont le partage et l’empathie quand on file acheter des cadeaux chers et inutiles en passant devant les SDF assis tout le long des grands boulevards des grands magasins ?
Noël nous renvoie à la figure les inégalités sociales et économiques de notre pays. Si certains vont acheter une montagne de cadeaux à leurs enfants qui ne sauront pas réellement en profiter, d’autres ne pourront pas se le permettre. A peine peuvent-ils offrir un meilleur repas pour leurs enfants.
L’actualité nous rappelle que le pouvoir d’achat dans une société où l’argent est le nerf de la guerre, est un pouvoir précieux. Et s’en trouver exclu conduit à se sentir rejeté. Certains préfèrent d’ailleurs rester chez eux plutôt que venir les mains vides.
Le stress de l’organisation
Entre le choix de la décoration, de la vaisselle, des cadeaux et du dressage de la table, organiser Noël dans un timing très serré est loin d’être une partie de plaisir.
Dans cette course infernale, ce sont encore très souvent les femmes qui s’y collent. Et loin d’être toujours aidées, leur Noël n’est jamais un moment de détente et de plaisir.
Et à raison, beaucoup d’entre elles se demandent : mais quel intérêt y a-t-il à enfiler une belle robe pour finalement passer la soirée à faire la serveuse ?
L’écologie
Evoquons enfin un sujet important auquel nous n’aurions pas pensé. Tous les ans des milliers de sapins sont abattus pour venir trôner dans notre salon le temps de quelques semaines. Ce qui est aussi absurde que désastreux.
Qu’en conclure de ces raisons ? Il n’est pas facile d’assumer détester Noël. C’est souvent jugé comme du cynisme. Pourtant, quand on se retourne sur les raisons de ce désamour, rien de ce qu’on y trouve nous choque ou nous surprend.
Ce sont les conséquences de certaines valeurs de notre société qui ont leurs travers.
A savoir, l’hyperconsommation qui conduit au gâchis et l’individualisme qui peut aboutir à la solitude.
C’est peut-être là la magie de Noël, celle de nous renvoyer à l’essentiel, à nos émotions et à nos difficultés autant intimes que sociales sans que nous en soyons toujours pleinement conscients au quotidien.
Pour retrouver le goût de la fête, la solution est d’être pleinement conscient de ce qu’il se passe en nous. De comprendre ce qui nous gêne dans nos Noëls. Et à partir de là, de décider de ne plus subir les évènements mais de les vivre. Autrement dit de les prendre à bras le corps et de retrouver un équilibre.
Pour Noël, cela implique de retrouver le sens de cette fête, qui est celui du partage, du pardon, de l’amour, du respect et de l’empathie. Quitte à bousculer ou renoncer à certaines traditions familiales qui nous vident de notre énergie.
Que cela soit avec des inconnus au sein d’une association caritative, des amis ou la famille, peu importe qui et combien, tant que vous passez un « vrai » Joyeux Noël.
Source : Roger Fiammetti, Les angoissés de Noël, Editions Josette Lyon, 2016
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