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Publié le 28/10/2020, mis à jour le 21/01/2023
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Justine Davasse : pour une écologie holistique!
Une posture éco-responsable
Justine Davasse est une militante éco-responsable, conférencière en transition écologique, créatrice du podcast « Les Mouvements Zéro ».
Dans son récent ouvrage, « Le guide des Mouvements Zéro pour un futur enfin désirable », elle nous donne les clés d’une démarche éco-responsable ainsi que la nécessité d’une pensée écologique holistique. C’est-à-dire une pensée amenant à décloisonner les différentes thématiques des mouvements (alimentaire, énergétique, économique etc.) pour trouver des solutions pertinentes et faire émerger une société plus sereine.
L’origine du mouvement Zéro
- Vous avez 31 ans, comment êtes-vous devenue militante ?
- J.Davasse : J’ai grandi de manière très banale, avec les supermarchés, les bouteilles en plastique, les aliments sous boîte. J’ai été sensibilisée par les enjeux écologiques lors des rencontres faites dans ma vie, je me suis rendue compte qu’on pouvait faire les choses différemment.
La prise de conscience est venue principalement par Lauren Singer, une militante écologiste américaine qui fait souvent mention de la proactivité, c’est-à-dire de la posture de ne plus subir sa vie et se plaindre, mais de faire.
Sa première action a lieu pendant une année d’étude en Finlande, au sein de sa résidence universitaire, où elle mit en place un système de ressourceries afin de mettre fin à un gaspillage considérable. Puis, en rentrant, elle adopta de nouvelles habitudes pour une vie « zéro plastique » puis « zéro déchet ».
- Comment s’est fait ce changement d’habitudes ?
- J.Davasse : Il faut repenser ses achats alimentaires (acheter en vrac) et non-alimentaires (achat en seconde main les vêtements par exemple, idem pour les appareils technologiques et divers équipements).
C’est donc d’abord un processus intellectuel avant une mise en pratique concrète. Cela demande un temps un peu ennuyant de recherche de solutions en soi, sur internet et autour de soi (voisin, associations etc.). En parallèle j’ai fondé mon podcast « Mouvements Zéro » où j’interviewe des gens investis dans l’éco-construction, la démocratie participative et d’autres mouvements écologiques et sociaux qui changent le monde.
Pour une pensée écologique holistique
L’exemple des noix de cajou
- On dit que l’enfer est pavé de bonnes intentions. Certains choix de vie plus écologiques, qui font du bien font aussi du mal par ailleurs. Vous prenez l’exemple des véganes grands consommateurs de noix de cajou.
- J.Davasse : Les noix de cajou viennent d’Inde où elles sont dénoyautées à la main par des femmes. L’opération leur brûle les doigts parce qu’il y a une sorte d’acide dans les noix. Il y a donc encore de la violence.
La production de noix de cajou n’est pas la seule à poser problème. Il y en a d’autres comme l’avocat, dont la culture et récole sont contrôlées par la milice et la mafia pour financer les armes, la drogue et la prostitution.
- J.Davasse : On ne peut pas isoler une problématique en disant « la révolution passe par l’assiette », je ne vais manger que des fruits et légumes et le monde sera meilleur. Il faut coupler cette question du végétalisme avec le bio et le local. Y a du local non bio et du bio intensif.
Il faut coupler les mouvements, une pensée isolée n’arrive pas à changer le monde, mais des idées associées entre elles, oui.
Le milieu associatif : de la compétition à la coopération
- Y a-t-il des passerelles, un dialogue entre les associations ou est ce qu’il y a de la rivalité ? Et parmi elles, y-a-t-il des courants antagonistes ?
- J.Davasse : C’est de l’humain et cela dépend de chaque humain dans les associations et collectifs. Mais quand il y a des projets mis en commun entre 5 et 6 associations cela fait des projets vraiment fou et superbes qui dynamisent des quartiers et qui redessinent une nouvelle société.
Bien sûr il y a de la compétition entre les milieux associatifs, je le déplore. Pourquoi c’est ainsi ? La réponse est simple : nous sortons tous d’un même système scolaire où il y a de la compétition entre élèves. Quand on y sort et qu’on veut créer ensemble en instaurant une vraie coopération sans enjeu de pouvoir, on n’a pas les outils nécessaires et c’est difficile. Cela reste encore un défi pour moi.
De l'urgence de changer de paradigmes
- La politique zéro déchet passe donc d’abord par une éducation en privilégiant de nouvelles valeurs (l’entraide plutôt que la compétition)?
- J.Davasse : L’éducation oui mais pas que celle des enfants. La nôtre et celle des élus politiques. On ne peut se permettre d’attendre trois générations, on a déjà besoin de restaurer plein de choses maintenant : la qualité des sols, des eaux, de l’eau et la confiance entre les gens.
Il y a un grand débat dans les milieux associatifs pour savoir d’où viendra le changement : de l’individu en bas ou des dirigeants en haut ? A titre personnel, je pense que cela viendra des deux côtés simultanément et il faut arrêter de se cacher derrière cette illusion que cela vienne d’un côté ou d’un autre, il faut que cela vienne des deux.
Tout seul, on peut décider de son mode de vie « zéro déchet » mais on ne décide pas de la politique de gestion de déchet, ou de l’entreprise qui s’installe. Beaucoup d’écolos évincent cette question, ce qui est une erreur parce qu’on a besoin du politique et d’aller voter pour les bonnes personnes.
De la nécessité d’une action politique
- Quel est votre secret pour voter pour les bonnes personnes ?
- J.Davasse : Je m’intéresse au décryptage des discours politiques. Cela sera un enjeu inévitable dans les années à venir pour discerner le sérieux du greenwashing. Il s’agira de se poser les bonnes questions et de discerner si l’action écologique proposée va être mise en place avec les citoyens qui habitent sur ce territoire ou non.
La convention citoyenne pour le climat
- Suggérez-vous que nous devrions passer par une nouvelle mise en forme du pouvoir comme la Convention Citoyenne pour le Climat ?
- J.Davasse : Je ne sais pas, en tout cas il est évident que la politique a un rôle à jouer. Aujourd’hui, on a cette fausse impression que parce qu’on vote pour quelqu’un, il a plus de légitimité que celui qui est tiré au sort. Alors que pas forcement. Le tiré au sort va être éduqué et rencontrer des experts qui vont parler de leur sujet et vont prendre des décisions éclairées. Celle de la Convention Citoyenne pour le climat a posé des positions pertinentes sur le trafic aérien régional ou la 5G.
La 5G
- Vous pouvez nous en dire plus sur la 5G ?
- J.Davasse : C’est un réseau intelligent, capable de privilégier une opération à l’hôpital plutôt qu’un téléchargement de film. Ce réseau dispose d’ondes intelligentes mais de courtes portées. Il va donc falloir multiplier les réseaux pour que les villes puissent les capter. Qui dit antenne nouvelle dit sidérurgie nouvelle. A court et moyen termes, cela fera des emplois dans l’industriel et la maintenance, mais les ondes posent d’autres problèmes :
- Beaucoup de scientifiques ont publié à propos de l’impact négatif des ondes sur la santé (maux de tête).
- Pour avoir la 5G, il faut avoir un nouvel équipement dont un nouveau téléphone portable. Or la production de ces objets ne fait pas partie des filières les plus éthiques, parce qu’il faut aller chercher les composants dans des mines de terres rares où enfants et adultes sont exploités.
A chaque progrès technologique, il faut évaluer les conséquences. Pour le cas de la 5G, il y a fort à parier que cela sera la précarité dans divers pays, et une fracture numérique qui grandit dans nos pays. Certains seront ultra équipés, tandis que d’autres seront complètement démunis.
- Un dernier mot ?
- J.Davasse : J’espère que le livre va aider les gens à avoir une pensée globale, parce que c’est complexe là où il y a beaucoup de paramètres. Je n’ai pas envie que cette complexité désespère les gens, j’ai plutôt envie que cela les rende curieux. La curiosité est quelque chose de très sain !
Propos de Justine Davasse recueillis par Amal Dadolle
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Publié le 28/10/2020, mis à jour le 21/01/2023