Que savons-nous de la naissance et du destin de l’univers...
Publié le 28/04/2021, mis à jour le 05/11/2024
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Que savons-nous de la naissance et du destin de l’univers ?
6 min de lecture
Voyage vers l’infini et l’au-delà
Le temps d’une matinée, un vendredi 23 avril 2021, l’actualité a délaissé les sujets de tension qui courent le pays pour se tourner vers le ciel.
L’astronaute le plus connu de France, Thomas Pesquet, accompagné de trois collègues, les Américains Megan McArthur, Robert Shane Kimbrough et le Japonais Akihiko Hoshide, s’est envolé vers la station spatiale internationale pour une mission baptisée « Alpha » de 6 mois. Au menu de leur voyage : de la maintenance, une centaine d’expériences dans divers domaines scientifiques et la préparation de futures missions sur la Lune et Mars.
Cette mission Alpha est pour nous l’occasion d’en apprendre plus sur l’univers en revenant sur quelques idées erronées ou obsolètes autour de sa naissance et de son destin en s’appuyant sur le dernier ouvrage de l’astrophysicienne Sylvie Vauclair « La nouvelle symphonie des étoiles. L’humanité face au cosmos » paru aux éditions Odile Jacob.
Soulignons avant toute chose que comprendre l’univers est certainement le défi intellectuel et cognitif le plus compliqué au monde, parce qu’il dépasse notre entendement, nos sens, notre expérience du temps et de l’espace.
Seules les mathématiques rendent l’univers intelligible. Seulement, c’est encore un autre challenge intellectuel que de savoir mettre des mots sur des équations. D’où la tentation de prendre un raccourci comme cela peut être le cas pour le Big Bang.
Le Big Bang et sa légende
Le Big Bang a-t-il fait boom ?
Quand on se représente le Big Bang, on se figure un feu d’artifice qui remplit un espace noir et vide. L’univers à ses débuts apparaît comme un tout petit point dense et brûlant, qui a fini par exploser en jets de lumière et de matière pour ne plus cesser de s’étendre.
Seulement, comme nous l’apprend Sylvie Vauclair, on n’en sait rien du tout. Mais cette image de feu d’artifice est commode, car le Big Bang repose sur deux points sur lesquels les chercheurs sont sûrs :
L’univers a bien été très chaud et dense dans son passé. Aujourd’hui, il se dilate et se refroidit.
L’univers est en expansion, c’est-à-dire que les distances entre les galaxies s’agrandissent. Et d’ailleurs, cette expansion serait en pleine accélération.
Pour autant, cela ne veut pas dire que l’univers faisait la taille d’une bille, qu’il y a eu explosion et que le Big Bang marque la naissance de l’univers. Parce qu’il y a une subtilité.
« Notre univers » n’est pas l’univers
La petite subtilité étant que la théorie du Big Bang ne s’applique pas à l’ensemble de l’univers mais seulement à la partie de l’univers que nous voyons. Celui que nous appelons « l’univers observable ».
En clair, il y a toute une partie de l’univers qui nous échappe. Conséquence de quoi, nous ne connaissons pas la dimension réelle de l’univers qui peut être infinie. Et « si l’univers est infini, il n’était pas plus petit dans le passé, car l’infini ne peut pas être plus petit que l’infini ».
Mais dans ce cas, comment l’univers observable (englobé de facto dans l’univers entier) peut-il être en expansion sans changer de taille ? Ce qui nous apparait comme un parfait contre-sens ne l’est pas d’un point de vue mathématique.
Ce qu’il faut retenir ici, c’est que même si la théorie du Big Bang est solide, elle n’est pas incontestable. Elle a ses paradoxes et ses lacunes, qui ne seront comblées et affinées qu’au fil des découvertes.
Suite au capharnaüm des discours médicaux entourant la Covid-19, Etienne Klein a rappelé à juste titre qu’il ne faut pas confondre science et recherche. La science, c’est le territoire du sûr, de l’acté. La recherche, c’est le règne de la probabilité, de l’enquête.
Or, pour ce qui est de l’astrophysique et de la cosmologie, on est exclusivement dans ce règne. Ce qui a inspiré ce bon mot d’Aurélien Barrau : « si vous voulez des certitudes, faites de la théologie. Pas de la physique. »
D’autres théories alternatives au Big Bang fleurissent. Le même Aurélien Barrau a publié en juin 2020 un article dans l’European Physical Journal où à la place du Big Bang, il suggère un modèle cyclique de l’univers où s’alternent les phases de contraction et d’expansion.
Quels sont les destins de l’univers ?
Big Crunch, Big Freeze, Big RIP ou Big Bounce ?
Si, comme nous le constatons, rien n’est acquis sur la naissance de l’univers, qu’en est-il de son destin, et éventuellement de sa fin ?
Sur ce sujet, quatre scénarios sont envisagés et souvent relayés :
Le Big Crunch : après une phase d’expansion, l’univers se réduit et se contracte pour s’effondrer. C’est le clap de fin définitif. Cette théorie n’est envisageable qu’à condition que l’univers soit « fini » et non pas infini.
Le Big Freeze : c’est un univers froid où toutes les étoiles et les sources d’énergies s’éteignent et se tarissent. Les trous noirs, entre autres, disparaîtront en s’évaporant. Là, encore, il ne restera plus rien.
Le Big RIP : ici, au lieu d’une phase d’une contraction de l’univers amenant à un Big Crunch, on a une expansion de plus en plus rapide et violente, qui va finir par déchirer l’univers et tout ce qu’il contient. Pour ce clap de fin final, il faut là encore que l’univers soit « fini ».
Le Big Bounce qui propose un modèle cyclique de l’univers où le Big Crunch est suivi dans la foulée par un Big Bang.
En quête de nouveaux scénarios
Pour savoir lequel de ces scénarios est le plus plausible, astrophysiciens et cosmologistes ont eu besoin d’une réponse-clé : l’univers est-il infini ou fini ? Sans rentrer dans les détails qui ont conduit à cette réponse, Sylvie Vauclair nous informe que « ce qui semble acquis, c’est que l’Univers n’est pas « fermé », il n’est pas replié sur lui-même et donc qu’il n’y aura pas de Big Crunch ». Pas plus qu’il n’y aura donc de Big RIP.
Pour ce qui est du Big Freeze, ce scénario serait également à écarter. La raison en est que les trous noirs, dont on vient que très récemment de confirmer l’existence, ne finissent par leur vie en s’évaporant. A la toute fin, ils rejettent toute la matière qu’ils contenaient. Leur « mort » est donc le début de quelque chose d’autre.
A ce propos, de nouvelles théories sur les trous noirs avancent qu’ils contiendraient des « bébés univers » en gestation. Une théorie aussi mignonne que bouleversante. Et en la matière, c’est loin d’être la seule.
Nota benne : Les trous noirs sont des objets célestes créent à la suite d’un effondrement d’une concentration de masse et d’énergie. Ces objets massifs disposent d’un champ gravitationnel si fort qu’ils attirent et capturent les objets à proximité, la lumière comprise. A noter cependant, que si l’objet dans le champ du trou noir dispose d’une masse aussi importante que ce dernier, l’attractivité du trou noir est nulle.
Et si l’univers était autodidacte ?
Début avril 2021, un groupe de sept chercheurs hétéroclites, issus de milieux universitaires et du centre de recherche de Microsoft, ont publié une théorie absolument inédite : The Autodidactic Universe
Comme l’indique le nom de la thèse, leur hypothèse est que l’univers serait un autodidacte qui serait parti de rien, et aurait évolué de façon autonome en apprenant à partir de lui-même et de ses diverses expériences.
Le fonctionnement de l’univers est comparé à celui du Machine Learning, une technologie issue de l’intelligence artificielle qui permettrait à un ordinateur d’apprendre de lui-même sans avoir besoin d’être programmé pour cela.
Dans le cas où cette théorie s’avérerait être juste, elle aurait des conséquences majeures dans la recherche. Il serait ainsi impossible de comprendre les lois de l’univers, puisqu’elles ne cessent d’évoluer.
Et quant à la question du devenir de l’univers, cette question serait caduque, puisque l’univers serait de toute façon imprévisible.
Enfin, nous qui scrutons l’univers depuis l’Antiquité, nous pourrions nous demander si finalement cette observation ne serait pas réciproque. Et dans ce cas, quelles leçons l’univers apprendrait-il de l’humanité ?
Gageons qu’il serait peut-être plus indulgent que nous ne le sommes envers nous-mêmes. Après tout, il a l’avantage pour lui d’être éternel, et donc infiniment patient…
Source : Sylvie Vauclair, La nouvelle symphonie des étoiles, éditions Odile Jacob, 2021
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