Nous connaissons tous cette petite voix dans notre tête qui tour à tour nous guide, nous inspire ou nous rabaisse. Si nous nous perdons souvent dans ses différentes injonctions, c’est parce que nous n’avons pas une mais des voix intérieures. C’est ce que nous révèlent deux coachs en développement personnel, Sophie Berger et Sylvie-Elizabeth Laborie.
La première dispose de vingt années d’expérience en intelligence émotionnelle et de conseils en management du changement. La seconde est devenue coach après un long parcours au sein des DRH. Ensemble, elles ont initié une nouvelle méthode de développement personnel qui repose sur le décryptage de notre dialogue intérieur composé de 18 voix qu’elles illustrent en 18 personnages.
Ces 18 personnages fonctionnent en duo. De leur interaction harmonieuse dépend notre équilibre intérieur. En prenant connaissance des 18 personnages qui nous habitent, nous prenons conscience de ceux qui prennent toute la place et de ceux que nous n’entendons jamais, nous amenant à douter même de leur existence. Mais soyez en sûr, toutes ces voix existent en chacun d’entre nous, et chacune d’entre elle a son rôle et son importance.
Décryptons maintenant les personnages ainsi que les raisons de leur omniprésence ou de leur absence. Gageons que vous allez très facilement reconnaitre en vous ou chez vos connaissances certaines d’entre elles.
Mis à jour des 18 personnages dans nos têtes
Couple 1 : l’enfant intérieur & le parent
Même si nous prenons de l’âge, l’enfant intérieur reste toujours présent en nous, ce qui explique nos besoins constants d’amour, de soin et d’attention. Une éducation trop rigide et sévère ainsi que des situations difficiles vécues dans l’enfance peuvent avoir éloigné la voix de l’enfant. Or, ne pas écouter la voix de son enfant intérieur nous conduit très souvent à étouffer nos émotions et à vouloir tout contrôler.
En revanche, si l’enfant domine les autres voix, nous sommes alors sous l’emprise de nos émotions et sommes incapables de les gérer. L’impulsivité des réactions de Donald Trump étant le bon exemple d’un enfant intérieur un peu trop criard. Le partenaire de l’enfant c’est le parent, qui est la petite voix qui nous souffle d’envisager la vie avec un juste sens des responsabilités.
Si la voix du parent est excessive, elle traduit un besoin viscéral d’exister à travers l’aide que nous apportons aux autres, même si personne ne nous a rien demandé. A contrario, si notre parent intérieur est complètement muet, nous aurons tendance à fuir toutes nos responsabilités et nos engagements.
Une relation équilibrée entre son enfant intérieur et son parent intérieur revient à savoir écouter, accueillir nos émotions et prendre nos responsabilités sans empêcher les autres d’assumer les leurs.
Couple 2 : le procureur & l’avocat
La petite voix du procureur nous la connaissons tous très bien, c’est celle qui nous pousse coûte que coûte à nous améliorer sans jamais être satisfait de nos efforts. Si nous n’écoutons qu’elle, nous développerons une image négative et dégradée de nous-mêmes.
Si en revanche, la voix du procureur est quasiment inexistante, ce n’est pas forcément mieux. Sans autocritique, ni repère de ce qui est bon pour nous, nous nous laissons vivre sans nous poser de questions sur les conséquences.
La petite voix de l’avocat est celle qui contrebalance celle du procureur. Elle nous défend en trouvant les mots justes, les bons arguments et les bonnes excuses pour nous protéger de nos propres pensées négatives ou des remarques désagréables venues de l’extérieur. Si nous n’écoutons qu’elle, nous serons confortés dans l’idée que nous ne sommes responsables de rien.
En revanche si notre avocat est aux abonnés absents, nous tombons sous le joug d’un procureur sévère nous renvoyant une image étriquée et négative de nous-mêmes.
L’équilibre est affaire de souplesse. Suivant les situations, mon avocat aura raison de faire entendre sa voix pour relativiser, faire accepter mes erreurs et prendre soin de mes intérêts.
Avec un bon avocat à nos côtés, le procureur ne peut plus nous plomber. Il devient alors un très bon guide qui nous pousse à voir et développer nos potentiels.
Couple 3 : le mental & l’affectif
Voilà un couple que l’on ne connait que trop bien. L’un est la voix du cœur, l’autre de la raison. Commençons par l’affectif. Si nous sommes trop dans l’affect, nous prendrons tout très à cœur, en ayant toujours besoin de l’attention des autres, d’être aimé, apprécié et que surtout cela soit dit et montré.
À l’inverse, un déficit d’affect, c’est le verrou mis sur les sentiments. On les écoute peu et on les exprime encore moins. Passons au royaume des pensées, le mental.
Comme pour la voix de l’affectif, si nous nous laissons déborder par nos pensées, nous éprouvons des difficultés à calmer le chaos des pensées. A l’inverse, utiliser peu ses facultés mentales, c’est rencontrer des problèmes de concentration ou de difficultés à résoudre ses problèmes.
Pour parvenir à un bon équilibre, nous devons apprendre à considérer et accueillir nos sentiments et nos pensées, sans pour autant nous laisser déborder par eux. Nous savons alors nous concentrer et réfléchir tout en étant capable de faire des pauses sans difficultés.
Couple 4 : l’actif & le flegmatique
L’action est le sacerdoce de la voix de l’actif. Entreprendre, réussir, avancer font partie de son vocabulaire. Mais exprimé en excès, l’actif nous enjoint à tout faire, nous rendant incapable de nous détendre et de savourer l’instant présent.
Un exemple typique étant le cadre dynamique qui arrive à caser trois activités sportives dans une semaine déjà chargée. À tout vouloir tout faire, nous sommes sans cesse débordés, tendus, sous pressions et manquons de temps pour notre famille.
A l’inverse, si la voix de l’actif est absente, nos projets n’aboutissent pas et nous ne cachons pas notre préférence à être plus spectateur qu’acteur. Dans ce cas, seule la voix du flegmatique résonne en nous.
Elle nous préconise le non-agir, le rythme lent et la contemplation. Bien sûr, si nous n’écoutons qu’elle, nous restons dans un état contemplatif, peu motivés à faire grand-chose.
Notre société du travail et des loisirs favorise la voix de l’actif. Mais nous savons qu’une vie équilibrée repose autant sur le temps de l’action que sur le temps du repos, qui est celui du temps de la pensée, de la contemplation et de l’imagination. Un temps, où sans forcément nous en rendre compte, nous trouvons des solutions à nos problèmes du quotidien.
Couple 5 : l’expansif & le réservé
Dans ce couple, se jouent notre degré d’ouverture à l’autre et la manière de nous extérioriser : de la plus impulsive à la plus discrète. L’expansif se ressource grâce au contact du monde extérieur, alors que le réservé puise ses forces dans la solitude et l’introspection.
Si nous n’entendons que la voix de l’expansif, nous ressentons le besoin viscéral d’accaparer l’attention des autres, jusqu’à raconter toute notre vie sans pudeur et sans être conscient de l’effet que l’on produit.
A l’inverse, si c’est la voix du réservé qui prédomine, nous ne nous exprimerons que peu en mettant toujours des distances entre nous et les autres, pour ne pas être jugé ni exposé.
Si le couple est équilibré, on s’exprime alors sans contraintes ni gênes tout en sachant nous faire accepter par les autres. On apprécie autant les moments de solitude, rien qu’à soi, que les moments de sociabilité.
Couple 6 : le conformiste & le libre penseur
Ces deux personnages nous sont familiers. Le conformiste en nous est notre petite voix attachée aux valeurs transmises dans le giron familial, social, culturel, religieux.
Tandis que notre voix incarnant le libre penseur est l’anti conformiste qui prendra du recul avec les valeurs que l’on nous a inculquées, préférant d’ailleurs s’ouvrir à d’autres cultures.
Si nous n’entendons que la voix du conformiste, nous serons inflexibles sur le respect et le suivi de ses valeurs. Le risque étant de vivre et de penser de façon triste et étriquée en s’en tenant à son petit vécu et en se fermant aux autres.
En revanche, si nous n’écoutons que la voix du libre penseur, nous tiendrons à vivre selon nos propres codes sans se soucier de ce que pensent les autres, quitte à se marginaliser car refusant la vie de groupe.
Pour parvenir à un équilibre entre ces deux contraires, rien de compliqué. Il suffit d’avoir quelques principes de vie tout en se gardant de tomber dans la rigidité et l’intolérance.
L’un de nos principes de vie pouvant d’ailleurs être l’ouverture d’esprit et la curiosité, deux valeurs incontournables pour notre développement intellectuel, moral et spirituel.
Couple 7 : le prévoyant & le flexible
Avez-vous tendance à tout prévoir à l’avance ? Du nombre d’enfants à l’avancement de votre carrière jusqu’à la planification de vos vacances ? Ou préférez-vous agir à l’instinct et en souplesse, en scrutant les occasions au cours de votre carrière et en réservant vos vacances sur lastminute.com ? Si vous ignorez totalement la voix du flexible, cela impliquera que vous ne vous sentez bien que dans un cadre défini, avec des habitudes et des rites qui vous protègent des imprévus.
La peur est la première cause qui nous empêche d’écouter la voix du flexible. Bien sûr, si nous n’écoutons que la voix du flexible et dédaignons la sage prudence du prévoyant, nous nous en remettons à la chance et au petit bonheur. Ce qui n’est pas sans être source d’anxiété.
Pour parvenir à l’équilibre, le mot clé est l’adaptation. On peut être structuré et organisé, tout en laissant une ouverture conséquente à l’imprévu et à la nouveauté.
Couple 8 : le pragmatique & le conceptuel
Le pragmatique appartient au monde de la matière quand le conceptuel appartient au monde des idées. L’un s’attache aux faits, l’autre aux théories.
Un pragmatisme excessif rend incapable de s’extraire de son quotidien, de ses habitudes ancrées et fuit les discussions philosophiques, artistiques ou même rigolotes (ex : « Et sinon tu penses quoi des extraterrestres ? »).
Quand on manque de pragmatisme, nous vivons la tête dans les étoiles et dans nos rêves. Nous sommes distraits et débordons de projets qui n’aboutissent à rien.
Mais ignorer la petite voix du conceptuel renvoie à la peur de se projeter dans l’avenir en restant dans le connu et le vécu qui nous rassurent. Conséquence de quoi, nous ne nous épanouissons pas complétement.
L’équilibre est de réconcilier les deux modes de réflexions en laissant vivre notre imagination et nos intuitons, tout en veillant à garder un bon sens des réalités quotidiennes.
Couple 9 : le bon vivant & l’ascète
Le bon vivant c’est la satisfaction des sens en tout point. On profite des plaisirs de la vie avec gourmandise. Mais être obnubilé par sa quête du plaisir, c’est devenir dépendant et s’exposer à la souffrance du manque. C’est généralement le signe d’une souffrance émotionnelle non accueillie et donc non soignée.
A l’inverse, museler la voix du bon vivant et tomber dans l’ascète excessif n’est pas une meilleure solution. Nous nous imposons une forme de comportement masochiste où nous nous sentons coupable rien qu’à l’idée de profiter de la vie et de partager de bons moments. C’est s’enfermer dans une vie triste et sans couleurs.
La sagesse réside dans l’autorisation des plaisirs sans excès pour notre santé. Nous savons très bien profiter d’un bon verre pour nous détendre sans aller jusqu’à la gueule de bois.
Nous avons maintenant fait les présentations de nos 18 personnages. Certains d’entre eux résonnent en vous, quand d’autres sont silencieux. Toutefois, maintenant que nous les avons identifiés et certifié que tous font partie de nous, nous allons pouvoir sortir de nos contradictions et de nos blocages.
Devenez le chef d’orchestre de vos 18 voix
Si vous avez pu constater que parmi les 9 couples qui vivent en vous, certains vivent une relation déséquilibrée, vous avez pointé vos faiblesses.
Pour les lever, il vous faudra d’abord les accepter et ensuite mettre en place les actions nécessaires pour rééquilibrer le couple et limiter les souffrances qui en découlent.
Ce qui commence donc par un travail d’introspection pour comprendre l’absence ou l’omniprésence de certaines voix. On met ensuite en place quelques actions concrètes pour renouer le dialogue avec l’une de nos voix absentes.
Ainsi si nous sommes trop expansifs, nous tâcherons de nous octroyer 10 minutes de silence par jour ou bien nous en dirons le moins possible à la prochaine fête.
En revanche, si nous sommes trop réservés, là aussi, nous tâcherons de comprendre l’origine de notre comportement et enclencherons quelques petites actions concrètes comme sourire à 10 personnes que l’on croise dans la journée ou entamer une conversation sur un sujet avec lequel on est à l’aise.
Prendre conscience que ces 18 personnages nous habitent et prêter l’oreille à chacun nous permet de développer des ressources insoupçonnées : une confiance en soi et une meilleure maîtrise de nos émotions négatives. Surtout, nous mettons fin à notre pilote automatique qui se reposait sur nos vieux réflexes nuisibles et inutiles.
Source : Sophie Berger & Sylvie-Elizabeth Laborie, « Les clés du dialogue intérieur pour vivre sans tensions », InterEditions, 2018
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