Comment attirer l’argent à soi selon la culture chinoise?
Publié le 22/03/2023, mis à jour le 02/01/2025
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Comment attirer l’argent à soi selon la culture chinoise?
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Quel regard les Chinois portent-ils sur l’argent?
S’enrichir est un état d’esprit. Cet état d’esprit est déclencheur pour attirer l’argent.
Et si attirer l’argent ne dépendait pas que du “faire” ? Dans la culture occidentale, faire, avoir et être sont trois mots différents et dont les dynamiques sont souvent dissociées. Alors que dans la pensée traditionnelle et la linguistique chinoises, faire, avoir et être combinent des flux en circulations représentés par des allégories.
Quand nous, Occidentaux, écrivons des mots, l’esprit chinois associe des images et dessine des idées.
Quand l’Occident attribue à l’argent des pensées matérialistes et autres tabous, la Chine l’inscrit dans un flux spirituel, quintessence de la vitalité.
Plus qu’une conquête matérielle, l’enrichissement est donc un état d’esprit en Chine. C’est grâce à lui qu’elle a pu devenir l’une des grandes puissances économiques mondiales.
Pour comprendre cet esprit d’enrichissement et son application, nous avons reçu Cyrille Javary, sinologue, écrivain, conférencier et consultant en culture chinoise ancienne et moderne.
Il est l’auteur des ouvrages tels que le Yi Jing le livre des changements, Le discours de la tortue et Yin Yang la dynamique du monde.
Son dernier ouvrage L’esprit d’enrichissement (Albin Michel) a été coécrit avec KimLi Fong Yan et Dominique Escande.
La première, une Réunionnaise d’origine chinoise, rapporte les coutumes familiales en rapport avec l’argent. La seconde est une cheffe d’entreprise qui a accompagné dès les années 1980 les entreprises françaises à évoluer sur le marché chinois de l’aviation privée.
CJ: Quelque chose d’aussi naturel, nourrissant et vital que le fait de manger. Ce dont les Occidentaux doivent s’inspirer, c’est le regard heureux que portent les Chinois sur l’argent.
Qu’est-ce que «porter un regard heureux sur l’argent»?
CJ: Selon la pensée chinoise, le vivre est quelque chose qui est rentré en nous un peu avant notre naissance, et qui sortira de nous un peu après notre mort. Entre la naissance et la mort, il faut entretenir et nourrir le vivre. Cela suppose de nourrir son corps mais aussi son compte en banque.
Un «vivre bien nourri», une bonne vitalité, repose sur toujours une circulation. Ce n’est donc pas la possession de richesses qui fait l’enrichissement mais la circulation de celles-ci entre les individus, les différentes générations. Entre le monde visible des vivants et le monde invisible des morts.
En Occident, le monde invisible est limité aux domaines du religieux et du magique, alors qu’en Chine le monde invisible est totalement associé au quotidien et au monde visible.
L’argent n’est donc pas un objet isolé de la vie, il est une énergie intégrée aux principes et aux flux de la vie. C’est sur ce postulat que repose l’esprit d’enrichissement qui va permettre d'attirer l'argent.
Qu’est-ce que l’esprit d’enrichissement?
L’argent comme flux énergétique
Vous écrivez que selon le grand traité de médecine traditionnelle chinoise: «s’assurer une bonne santé financière est aussi naturel et aussi bénéfique que de pratiquer des exercices appropriés afin de s’assurer une bonne santé physique. En quoi entretenir son compte bancaire entretient son capital santé?
CJ: Il faut nourrir son compte en banque comme on nourrit son corps. Sans cela, on peut avoir des ennuis de santé ou financiers. Par ailleurs, une vie bien nourrie ou la vitalité repose sur la circulation. Le corps ingère de l’énergie sous forme d’air et il en expulse sous forme de déchets. C’est grâce à la circulation de cette énergie que le corps reste au chaud, actif et en santé.
Le Chinois agit de même avec son compte en banque. Une partie de son salaire est mise de côté en cas d’imprévus, puis deux autres parties «circulent». Elles sont consacrées à:
Sa famille (l’éducation des enfants et le soutien à ses parents),
La tontine, un système de mise en commun de l’argent.
Par exemple, lors d’un mariage, chaque invité donne aux jeunes mariés une somme d’argent qui leur permet d’avoir un capital. La somme de chaque invité est connue, et lorsque cet invité, sa fille ou son fils se mariera, il recevra cette somme (voire davantage).
Autre exemple de tontine. Quand un Chinois ouvre un restaurant, il propose à un cousin de venir travailler pour lui. Pendant 5 ans, le cousin ne touche qu’une petite partie de son salaire. Il n’en reçoit la totalité qu’à la fin de son «quinquennat». Cette somme conséquente permet au cousin de lancer sa propre affaire et de faire venir un autre cousin avec lequel il recommence la même opération. Fonctionner de cette manière permet un développement économique viral.
Un esprit en harmonie avec le changement
Chez nous, l’argent ne fait pas le bonheur. Chez les Chinois, le bonheur fait l’argent. Comment le fait-il?
JC: Dans le sens où le don gratuit est absent de l’esprit chinois. Un don génère toujours un contre-don. Le rapport à l’argent est profondément confucéen, car selon Confucius les rites sont essentiels pour nous aider à bien nous comporter. Le contre-don apaise les rapports sociaux, en plus de générer une circulation et donc de la vitalité.
Vous expliquez que les Chinois s’étonnent que nous ayons de la chance quand eux l’attrapent. Quelle est la perception chinoise de la chance et du hasard?
JC: La chance est toujours quelque chose dont vous n’êtes pas responsable. Ainsi, les Chinois s’étonnent que les Occidentaux, peuple réputé cartésien, accouplent le verbe de la possession matérielle à ce qu’il y a de plus subtil.
L’équivalent chinois de l’expression «avoir de la chance» est pèng yùn qi, qui se traduit littéralement ainsi : «attraper (ou saisir) le souffle (ou la forme de l’énergie) en train de passer». Avoir de la chance est donc la capacité à saisir l’opportunité du moment. Ce postulat impacte grandement ce potentiel à attirer l'argent.
De même le terme «weiji» signifiant la crise (un phénomène toujours angoissant pour l’Occidental) associe l’idée de passage difficile et d’opportunité.
JC: Avoir de la chance est la capacité à saisir l’opportunité du moment. Cette vision justifie le fait d’avoir toujours un plan B, C, D pour prévoir les revers. Ce n’est pas pour rien que le grand livre de la pensée chinoise s’appelle le Classique du changement, le Yi Jing .
Apprendre à modifier notre perception des changements nous apporterait à mieux les vivre et s’initier à l’esprit d’enrichissement.
Comment s’acquiert l’esprit d’enrichissement?
Percevoir les flux d’enrichissement
Vous écrivez que tout le monde peut percevoir les flux d’enrichissement et agir sur eux. De quelle façon le peut-on?
JC: Il y a des endroits où l’on se sent bien et d’autres où l’on se sent mal. J’habite une rue au milieu de laquelle se trouve une boutique qui change de propriétaire tous les deux ans. Il y a un mauvais flux évident mais que les gens ignorent quand ils l’achètent. Cela n’arriverait pas aux Chinois qui sont des observateurs rigoureux. Ils savent qu’indépendamment de la composition de la terre, il y a des endroits où les plantes poussent mieux.
La perception des flux invisibles s’apprend par la répétition de l’observation. C’est cette rigueur qui leur a permis de découvrir l’énergie vitale circulant dans le corps et de développer des pratiques telles que l’acupuncture .
Choisir de nourrir un mental heureux et orienté vers l’abondance pour attirer l'argent
Vous écrivez: «l’esprit d’enrichissement n’est pas inné, il s’apprend». Comment s’acquiert cet esprit? Comment le transmettre à nos enfants?
JC: Tout d’abord en créant un rapport heureux autour de l’argent. KimLi Fong Yan raconte qu’elle a reçu un billet pour la première fois lors du nouvel an chinois. Cette fête est l’occasion de se rassembler en famille, de manger de bonnes choses et de faire découvrir l’argent aux enfants. L’argent leur est présenté sous forme de billets neufs mis dans une enveloppe rouge, couleur de la joie et de la vie.
Passée cette première rencontre heureuse avec l’argent, il existe dans l’univers quotidien et mental des Chinois des attracteurs d’argent. Ce sont des mots, des objets, des pratiques qui rappellent au quotidien le choix de nourrir un état d’esprit tourné vers l’abondance plutôt que la pénurie.
Exemples pour attirer l'argent:
Les aquariums qui contiennent de l’eau (symbole de la circulation) et des poissons, dont le mot en chinois est similaire au mot «surplus».
Le crapaud à trois pattes, un animal symbolique privé d’anus et se nourrissant exclusivement de pièces de monnaie. De cette façon, il attire la richesse.
Les raviolis chinois, qui contrairement aux raviolis italiens, ont la forme de lingots d’or. Or, selon la pensée chinoise, tout ce qui a la forme d’une chose possède la même force énergétique de cette chose.
Au-delà de ces pratiques, comment s’incarne l’esprit d’enrichissement nécessaire pour attirer de l'argent?
Comment s’incarne l’esprit d’enrichissement?
Contrairement à l’esprit occidental, dans la vie sociale chinoise le don n’est pas gratuit. Comment s’incarne cette relation aux dons?
JC: D'une manière qui nous semble incohérente. Selon un proverbe français, les cadeaux entretiennent l’amitié. Or, pour les Chinois, l’amitié est inoxydable, elle est une relation fraternelle où il n’y a justement pas besoin d’entretenir de relations. Contrairement aux relations sociales qui ont besoin d’être soutenues grâce aux dons.
Vous expliquez qu’en affaire, l’entrepreneur chinois a toujours un plan B, C, voire D et qu’il développe volontiers des activités différentes en même temps alors qu’en France cela n’est pas bien vu. Pourquoi?
JC: Selon le Yi Jing, le livre des Changements, la seule chose qui ne changera jamais, c’est le changement. Les Chinois sont un peuple de paysans qui ont toujours considéré que sans le changement des saisons et l’alternance de la pluie et du soleil, l’agriculture serait impossible.
De même que les saisons, les temps de paix s’alternent avec les temps de guerre ou de crise. Ne pas avoir de plan B, C ou D durant ces temps incertains est très dangereux. Nous pouvons vite nous retrouver démunis.
Ce rapport décomplexé à la richesse et à l’argent prend sa source dans une vision dépassionnée de l’argent. Comme le rappelle Cyrille Javary, «[pour les Chinois] s’enrichir n’est en soi ni un but, ni un mal, mais un fait naturel aussi évident qu’éduquer ses enfants ou entretenir ses parents devenus vieux».
Un état d’esprit qui cesse de faire de l’argent un tabou et un révélateur de conscience en le repositionnant à sa juste place. Celle au service du mieux-être personnel et collectif.
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