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Publié le 02/02/2022, mis à jour le 26/07/2024
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La méditation est-elle l’avenir de la santé mentale?
L’invitation à méditer du Dr Steven Laureys
Le neurologue qui méditait
La recherche scientifique attribue à la méditation de nombreux et précieux bienfaits pour le cerveau et le corps, aujourd’hui bien connus de la majorité des Français.
Toutefois, et en dépit d’un énoncé d’une simplicité déroutante, la méditation suscite encore certaines réticences, même pour ceux qui désireraient la pratiquer.
Comment expliquer ces réticences ? Comment les dépasser et pratiquer quotidiennement la méditation ? Et au-delà d’elles, existe-t-il des situations où la méditation est déconseillée ?
Pour mieux comprendre la nature, les possibilités et les enjeux de cet art ancestral encore auréolé de mysticisme, nous avons rencontré Steven Laureys, neurologue mondialement connu pour ses travaux sur la conscience et le coma, et auteur du récent ouvrage « Méditer avec le Dr Steven Laureys – Carnet d’exercices de méditation » (Odile Jacob, 2022).
- Dr Laureys, comment avez-vous choisi les exercices proposés dans ce livre ?
- SL : Lors d’une crise personnelle en 2012, j’ai été confronté à un ressassement mental lourd et anxieux. J’ai cherché à y mettre fin autrement que par la consommation d’antidépresseurs, d’alcool ou de cigarette. En 2013, j’ai rencontré Matthieu Ricard, moine bouddhiste et rock star de la méditation, qui m’a initié à cette pratique. Suite à cette première expérience, je me suis intéressé aux programmes de réduction de stress par la pleine conscience, l’hypnothérapie, la sophrologie et d’autres méthodes et thérapies. Certaines approches m’ont correspondu, d’autres non comme le bodyscan.
Le carnet d’exercices de méditation du Dr Laureys reprend l’ensemble de ces différentes pratiques en explicitant les besoins auxquels elles répondent.
Le lâcher-prise, un prérequis à la méditation
Extrait de l’ouvrage « Méditer avec le Dr Steven Laureys – Carnet d’exercices de méditation
« Vous pouvez adapter facilement la durée et le degré de difficultés des exercices selon vos envies et vos besoins. Ne soyez pas trop exigeant envers vous-mêmes. Faites ce que vous pouvez et ne placez pas la barre trop haute, n’oubliez pas que vous n’êtes pas un moine bouddhiste éclairé. Néanmoins, chaque moment que vous consacrerez à œuvrer à votre bien-être mental et physique sera bénéfique.
La méditation n’est donc pas un sport de compétition, veillez à ce que vos attentes ne soient pas trop grandes. Tous les exercices ne conviendront peut-être pas à tout le monde. Essayez ceux qui vous attirent et réessayez ensuite à un moment opportun. Comme pour les sushis, si ceux-ci ne vous conviennent pas, essayez-en d’autres. »
- Pourquoi avez-vous choisi de partager cet extrait ?
- SL : Cet extrait rappelle que le lâcher-prise est une condition importante de la méditation.
- La méditation est à la fois un besoin universel et une découverte personnelle qui demande des efforts pour que nous en ressentions ses bienfaits. Il ne faut donc pas se mettre de pression ou vouloir courir après un résultat. Il faut faire ce qu’on peut.
Pourquoi devrions-nous pratiquer la méditation ?
- Quels sont les principaux bienfaits de la méditation ?
- SL : Au même titre que le sport, il y en a beaucoup trop pour tous les citer. Si le sport apporte des bienfaits pour notre santé physique, la méditation nous aide à prendre soin de nous et de notre santé mentale. Nous observons d’ailleurs des effets positifs au niveau du cerveau et de nos chromosomes.
Parmi les principaux bienfaits de la méditation, le Dr Laureys rappelle qu’elle nous aide à :
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- Gérer le stress.
- Résoudre nos problèmes de sommeil.
- Rester attentif et concentré.
- Stimuler notre créativité.
- Développer notre empathie et compassion.
Par de maints aspects, méditer contribue à faire de nous une personne meilleure.
- Selon vous, nous pratiquons la méditation à notre insu, durant des moments quotidiens. Quand nous cuisinons, courons ou faisons quelque chose que nous aimons, nous méditons sans en avoir conscience…
- SL : Tout à fait, quand on court, écoute de la musique ou colorie un mandala, il y a effectivement aussi une forme de méditation. Par ailleurs, la nature nous aide à trouver des temps de méditation en nous offrant des occasions de contemplation.
Quelles sont les limites et contraintes à la méditation ?
- Y a-t-il des contres indications ou des effets secondaires à la pratique méditative ?
- SL : Oui, la méditation n’est pas une question de croyance, son action a été démontrée scientifiquement. Ma mission est de savoir comment bien utiliser la méditation en réalisant des études cliniques pour définir ses indications, contre-indications et effets secondaires. C’est le même procédé utilisé pour un médicament.
L’effet secondaire le plus courant sont les attentes individuelles trop hautes. La méditation, même pratiquée très assidument, ne soignera jamais d’un cancer du cerveau, par exemple.
Quant aux contre-indications, elles sont quasi-inexistantes, même dans le cas d’une psychose ou d’une maladie psychiatrique où la condition impérieuse sera d’être bien entouré.
- Quelles sont les résistances les plus fréquemment rencontrées pour la pratique de la méditation ?
- SL : Les a priori négatifs. La méditation est associée aux ambiances légères et dangereuses des hippies, des drogues et des illuminés du New Age. On peut également se dire que cela n’est pas fait pour soi, parce que cela suppose d’être calme alors qu’on se sait nerveux. Et pourtant, la méditation ne doit en aucun cas être vue comme une pratique réservée aux moines bouddhistes et aux illuminés. Chacun peut en faire une habitude modelée à son image, selon ses besoins et possibilités.
En dépit de ses résistances, le Dr Laureys en reste convaincu : à cause des dégâts causés par le stress chronique sur notre corps, notre esprit et notre cerveau, la méditation va faire partie de notre hygiène de vie. Tôt ou tard.
L’irrésistible ascension de la médecine alternative
L’hypnose à l’hôpital
- Vous définissez la méditation comme étant le sport du cerveau. Dans votre ouvrage, vous consacrez un chapitre à l’autohypnose en commençant par cette phrase : « l’esprit est comme un muscle, plus vous l’exercez, plus il devient fort et plus il peut s’étendre », est-ce à comprendre que l’hypnose (ou l’autohypnose) et la méditation ont les mêmes résultats ?
- SL : Il y a des différences neurologiques entre la méditation et l’hypnose, de même qu’il y en a avec la transe. Il y a différentes approches sans que l’une ne soit meilleure que l’autre. Actuellement, nous proposons à des patients atteints du cancer d’essayer les trois pratiques. On compare ensuite les effets positifs ou secondaires, ainsi que l’impact sur la qualité de vie comme soin complémentaire (et en aucun cas alternatif).
- Vous décrivez une expérience pratiquée sur 10 000 patients ayant subi une intervention chirurgicale, type tumeur mammaire, sous hypnose et sans anesthésie générale. Qu’est-ce que suppose cette révolution thérapeutique pour l’avenir de la médecine ?
- SL : Elle suppose de pouvoir proposer de meilleurs soins. Nous avons maintenant une base de données de 20 000 patients, dont moi-même, qui ont subi une intervention chirurgicale sous hypnose. Sur ces milliers de patients, seule une dizaine où dû avoir recours à une sédation classique.
- Pourquoi privilégier l’anesthésie sous hypnose plutôt que sous sédation ?
- SL : Il y a de multiples avantages à l’anesthésie sous hypnose : elle nous rend moins dépendants des médicaments, nous pouvons ressortir de l’hôpital le jour même de l’opération. Au final, notre corps souffre beaucoup moins que sous sédation. A un certain âge, une intervention sous sédation n’est d’ailleurs jamais sans danger.
- Toutefois, il ne faut absolument pas éviter l’anesthésie générale ou les médicaments. L’anesthésie sous hypnose est un choix, une option possible mais pas obligatoire.
Perspectives sur la médecine de demain
- Pour vous, la santé mentale est un enjeu majeur de la santé publique, comment voyez-vous son évolution ?
- SL : J’espère que c’est aussi le cas des politiciens. Un Français sur trois va être confronté à un problème de santé mentale, or nous continuons d’ignorer ce sujet et à ne pas investir suffisamment dans notre bien-être mental. Il faut se ressaisir avant que cela ne soit trop tard.
- En parallèle, la médecine de demain fera beaucoup plus appel au patient. Elle lui donnera la possibilité, voire la responsabilité de jouer un rôle dans sa guérison.
Un rapport publié en 2019 par l’IRDES, l’Institut de Recherche et Documentation en Economie de la Santé, témoigne de l’urgence exprimée par le Dr Laureys.
« En France, les troubles mentaux (maladies psychiatriques ou consommations de psychotropes) représentent le premier poste de dépenses du régime général de l’assurance maladie par pathologie, avant les cancers et les maladies cardio-vasculaires, soit 19,3 milliards d’euros. Le coût économique et social des troubles mentaux est évalué à 109 milliards d’euros par an. »
- Quelles mesures envisager ?
- SL : On ne peut plus se contenter d’installer une ligne « SOS suicide », il faut s’interroger sur les raisons de cette détresse psychologique et émotionnelle collective au sein d’une société d’abondance.
- Il faudrait mobiliser l’intelligence collective, tous ceux qui travaillent dans le domaine de la santé mentale pour réfléchir ensemble sur le bon trajet de soin et de prévention.
- Enfin, il serait intéressant que la méditation soit enseignée à l’école, au travers de l’éducation physique et sportive par exemple.
Conclusion ?
Sans que nous nous en rendions compte, la méditation est en train de vivre une révolution en Occident. Même si les préjugés et ignorances subsistent, la méditation ne peut plus être aujourd’hui considérée comme une lubie de bobos esseulés.
Ses bienfaits sont non seulement incontestables et bienvenus dans cette société agitée, mais en plus il n’est absolument pas besoin d’adopter la position du lotus pour exercer une pratique méditative.
Le Dr Laureys en est convaincu, la méditation va devenir une affaire sérieuse pour tous. Car, si nous ne venons pas à elle, elle viendra à nous. Sous forme de prescription.
Ce n’est qu’une question de quelques années.
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