On l’évoque peu, mais c’est une réalité : de plus en plus de parents consultent des psychologues pour se confier sur leurs difficultés relationnelles avec leurs enfants. Les enfants en question ne sont pas des ados mais ont 3, 4, 8 ans.
Dans l’Histoire de la Famille telle que nous la connaissons, cela doit être une grande première. Un signe de changement d’époque.
Ces parents qui craquent expliquent en consultation être incapables d’instaurer une bonne autorité ou un cadre de vie stable à leurs enfants. Ils sont débordés, et parce que leurs enfants sont particulièrement hostiles et agités à leur égard, leur sentiment d’échec s’accompagne souvent d’un chagrin amer.
Il est courant et naturel que nos bonnes intentions soient maladroites quand on ne comprend pas le comportement de l’autre. Nous le concevons très bien quand nous rencontrons un adulte d’une culture différente de la nôtre.
Or, c’est un peu la même chose avec les jeunes enfants. Ils n’ont pas vocation à gâcher la vie de leurs parents quand ils deviennent infernaux.
Simplement, ils traduisent à leur manière leur ressenti : je me sens mal et perdu.
Quand les enfants craquent
Saviez-vous qu’avant l’âge de 3-4 ans les enfants sont incapables de faire un caprice ?
Leur cerveau en est tout simplement incapable. A leur stade, ils peuvent simplement concevoir des stratégies comportementales pour nous indiquer leurs besoins. Dont celui d’avoir un esprit en paix grâce à un cadre rassurant, entourés d’adultes responsables et cohérents dans leurs mots et leurs actes.
En clair, ils ont besoin de repères pour comprendre où ils habitent. Et moins les enfants ont de repères, plus ils se sentent insécurisés et perdus.
Ils vont alors développer une stratégie comportementale de provocation dont le but inconscient est d’obliger leurs parents à leur donner des limites et des repères pour s’apaiser.
Non seulement, les stratégies des enfants ne sont pas toujours bien comprises des adultes, mais depuis Œdipe, nous savons que la relation parent-enfant s’accompagne de complexes.
Les défis de la relation parent-enfant
Si les relations parent-enfant étaient simples, on n’aurait pas écrit autant de livres de fiction ou d’études psychologiques sur le sujet. Nous allons ici nous contenter d’en aborder deux principaux.
Les enfants sont des éponges dans le sens où ils s’imprègnent de leur environnement pour comprendre le monde et s’y adapter au mieux. A ce titre, leur comportement reflète celui de leur entourage.
L’attitude agressive d’un enfant peut être ainsi le signe qu’il y a un dysfonctionnement à la maison (ou à l’école).
Ainsi, les enfants qui mordent externalisent une agressivité qu’ils voient autour d’eux. Ceux qui font des cauchemars externalisent une angoisse.
La question est : quelle angoisse et quelle agressivité ils évacuent, la leur ou celle des parents ? L’enfant peut sentir des tensions au sein du couple, ou peut-être malmené par un « grand » à l’école.
En tout cas il y a une origine au problème. La bonne attitude à adopter dans ce cas-là n’est pas de vouloir absolument calmer l’enfant en lui racontant une histoire, mais de le faire parler pour comprendre où est le souci.
Les blessures d'enfance
Un autre aspect plus délicat est que certains enfants renvoient leur parent à leurs blessures d’enfance. Bien sûr, cela se fait plus ou moins consciemment et à différents niveaux.
Néanmoins, si en tant qu’adulte, on n’a pas pris le temps de se réconcilier, en conscience, avec une enfance difficile, on risque de répéter des schémas familiaux indésirables.
L’intérêt premier de se tourner vers ses blessures du passé, c’est que l’on construit une relation tendre avec soi-même.
C’est là où l’on prend conscience qu’être parent c’est une joie et une chance : pour eux nous pouvons trouver le courage de nous délivrer du passé pour nous épanouir au mieux tous ensemble.
Comme toujours, tout commence par soi. Et mieux on se connaît, plus on a une bonne idée de ce que l’on veut être ou ne pas être en tant que parent.
Quel parent avez-vous envie d'être ?
Quel éducation avez-vous reçue ?
C’est en prenant conscience de l’éducation que nous avons reçu que nous pouvons comprendre l’impact qu’elle a sur nous et notre personnalité. Voici les questions principales à se poser :
Quel modèle éducatif avez-vous reçu ? Plutôt strict et rigide ?
Encadrant et bienveillant ? Du grand n’importe quoi ?
Comment vous êtes-vous construit face à ce modèle ? En rébellion, en accord, ou plutôt neutre ?
Que souhaitez-vous garder ? qu’aimeriez-vous inventer de différent ?
Par cette introspection, nous repérons les schémas parentaux que nous sommes susceptibles de reproduire, tout en ayant une idée de notre idéal de parentalité.
Quel est votre parent idéal ?
Quel parent voulez-vous être ? Autoritaire et colérique comme pouvait l’être votre mère ? Chaleureux et à l’écoute comme votre grand-oncle ?
Quel que soit le modèle choisi ou imaginé, l’idée est d’incarner le parent que vous auriez voulu avoir pour en faire profiter votre enfant. Ce parent idéal n’est pas une image figée, en fonction de votre expérience et de l’âge des enfants.
Plus que notre idée du parent idéal, ce que nous incarnons, ce sont les valeurs et les idées sur la vie qui les accompagnent. Tout l’intérêt réside dans le fait que c’est en incarnant nos idées et nos valeurs que nous les transmettons le mieux aux enfants.
Le désir mimétique des enfants
Nous n’en sommes pas forcément conscients, mais les enfants, surtout les petits, apprennent tout le temps. C’est un désir naturel chez eux. Leur premier sujet d’étude étant leurs parents. En les observant interagir avec leur environnement, ils les copient estimant que c’est la voie à suivre pour s’intégrer dans le monde.
C’est ce qu’on appelle le désir mimétique. Ils ressentent le besoin de faire « comme papa, maman » pour mieux comprendre le fonctionnement de ce monde.
Jean Jaurès l’avait donc bien remarqué :
on n’enseigne pas ce que l’on sait ou ce que l’on croit savoir : on n’enseigne, et on ne peut enseigner, que ce que l’on est.
Incarner ses valeurs et son enseignement
Finalement, les enfants nous imitent plus qu’ils nous écoutent. La fameuse formule « faites ce que je dis et pas ce que je fais » nous montre aujourd’hui ses limites. Une éducation transmise est une éducation où l’on montre l’exemple et non que l’on dicte.
Si des enfants sont nerveux et excités, s’agiter en leur criant de se calmer pourra marcher le temps de 5min. Si vous voulez le calme à long terme, la meilleure stratégie consiste à respirer et à commencer par être calme soi-même.
D’ailleurs, à propos des téléphones et des tablettes, pour éviter que vos enfants ne vous les réclament, évitez de passer votre journée le nez collé dedans.
Les 4 clés de bien-être pour s'épanouir dans son rôle de parents
1. Cultiver son énergie
Cela consiste à reconnaître votre fatigue et vos limites. Il est important de vous octroyer quelques routines pour vous ressourcer (sport, lecture, méditation).
2. Communiquer
C’est la clé d’un foyer heureux. Si votre enfant fait une crise, il y a toujours une explication à son mal-être. Cela ne vient jamais de l’espace. Pour le découvrir la communication est essentielle, et si besoin demandez de l’aide auprès d’un professionnel.
3. Revoir ses croyances limitantes
On pense par exemple que les tout-petits font des caprices ou qu’il est impossible d’élever des enfants sans une fessée. Or on sait aujourd’hui que la fessé est peu efficace car l’enfant est plus concentré sur la souffrance que sur la leçon à retenir. On sait aussi qu’il existe des méthodes d’éducation où il est possible de se faire obéir sans violence. Devenir parent n’est pas naturel, surtout quand on a eu des modèles parentaux dysfonctionnels. Nombreux sont les livres, les blogs et les stages de parentalité pour nous ouvrir à d’autres modèles.
4. Cultiver son cerveau
Pour son propre bien et pour celui de ses enfants comme nous l’apprend le pédopsychiatre Daniel Siegel : « En grandissant, le cerveau de l’enfant se construit en miroir de celui de ses parents. Si les parents gagnent en équilibre émotionnel, les enfants en récoltent les fruits et évoluent eux aussi vers davantage d’équilibre. Cela signifie qu’intégrer et cultiver votre propre cerveau est le plus des cadeaux que vous puissiez faire à votre enfant. »
Sources : Delphine Tordjman Bourdet, « Le coaching parental avec les enfants, ça marche ! », éditions Le Courrier du Livre, 2019 et le huffingtonpost
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