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Publié le 26/02/2024, mis à jour le 05/11/2024
Podcasts santé
Comprendre les addictions
Quels sont les facteurs à l’origine des addictions ?
Dans son dernier ouvrage, « Docteur Addict ou pas », Laurent Karila, éminent psychiatre et addictologue, nous offre une immersion dans le monde souvent mal compris de l’addiction. Avec la précision d’un expert et la sensibilité d’un artiste, Karila dévoile les multiples facettes de cette maladie complexe, en s’attaquant aux idées reçues et en éclairant les chemins moins parcourus de la rémission.
D’emblée, l’auteur pose les jalons de la discussion en abordant les facteurs de risque qui prédisposent à l’addiction. Ce faisant, il brosse un tableau nuancé des influences génétiques, environnementales et psychologiques, mettant en lumière la fine frontière entre usage et abus.
Karila n’hésite pas à qualifier l’addiction de maladie chronique, nécessitant une prise en charge adaptée et pérenne. Ce positionnement, loin d’être défaitiste, se veut un appel à la compassion et à l’action, rappelant que derrière chaque cas se cache une histoire humaine, souvent marquée par la souffrance.
L’ère numérique, avec son cortège d’écrans omniprésents, n’est pas épargnée par l’analyse de Karila. L’auteur s’interroge sur l’impact de cette consommation digitale excessive sur notre bien-être psychologique, soulignant l’urgence d’une réflexion collective sur nos habitudes technologiques.
Frontières thérapeutiques : psychédéliques et addiction selon Karila
Peut-être le plus surprenant, et certainement le plus intrigant, est le chapitre consacré au potentiel thérapeutique des psychédéliques. Karila, avec une ouverture d’esprit caractéristique des grands chercheurs, explore les promesses de ces substances longtemps marginalisées, suggérant qu’elles pourraient représenter une nouvelle frontière dans le traitement de l’addiction.
À travers ce podcast et son livre « Docteur Addict ou pas », Laurent Karila ne se contente pas de dresser un état des lieux ; il nous interpelle, nous questionne et nous convie à un voyage au cœur de la condition humaine. Les points d’action qu’il propose, loin de se résumer à des recommandations cliniques, sont autant d’invitations à repenser notre rapport à l’addiction, à la maladie, et finalement, à notre propre humanité.
En somme, Karila réussit le tour de force de nous présenter un sujet d’une complexité abyssale avec une clarté et une empathie qui rendent son message non seulement accessible, mais profondément humain. « Docteur Addict ou pas » est une œuvre essentielle, qui résonnera longtemps auprès de ceux qui cherchent à comprendre les mystères de l’addiction, et à trouver des voies de guérison.
Comment prévenir les addictions ?
AD : Vous mentionnez dans votre livre que la diction peut-être considéré comme une maladie chronique, pourriez-vous nous expliquer comment cette perspective change la manière dont nous devrions aborder le traitement et le soutien de personnes touchées ? Laurent Karila : c'est une maladie chronique maladie chronique comme un diabète. Une pathologie cardiaque, c'est un terme médical qu'on manie avec précaution, n'est-ce pas ? Il évoque immédiatement l'idée de quelque chose de sérieux, de suivi médical, de traitements. Quand on parle de ces pathologies, on se place immédiatement dans une démarche proactive : on les traite. On intervient sans attendre sur les épisodes aigus, ces complications imprévisibles qui jaillissent comme autant de défis à notre santé. Et puis, il y a ce travail de fond, moins spectaculaire mais tout aussi crucial, pour stabiliser la maladie. Parce qu'une maladie chronique, on le sait bien, on ne s'en débarrasse pas comme d'un rhume. On cherche plutôt à atteindre un état de stabilité, une forme de rémission.Vivre avec l'addiction: un combat silencieux contre une maladie incomprise
Et donc, parlons de l'addiction. Ce terme, à la mode, galvaudé, est passé dans le langage courant, vidé de sa substance. On le retrouve partout, dans la publicité, dans les conversations, utilisé à tort et à travers. Mais rappelons-nous qu'il désigne une réalité bien plus grave : une maladie. Une pathologie qui, à l'instar d'un trouble cardiaque, a des répercussions négatives, douloureuses, tant pour la personne qui en souffre que pour son entourage. L'addiction est une maladie chronique. C'est un fait. Dans mon livre, je m'attache à démonter cette banalisation du terme "addict". Je veux remettre les pendules à l'heure : être addict, ce n'est pas tendance, c'est lutter. Alors, comment devient-on addict ? Ce n'est pas une fatalité qui touche tout le monde, mais il existe des facteurs prédisposants. Et c'est là que le débat s'ouvre, que la réflexion s'enrichit. Car traiter l'addiction nécessite une armée de professionnels, une pluralité d'approches thérapeutiques, une stratégie globale. C'est ce que j'explore dans cet ouvrage, c'est ce combat que je mets en lumière.L’addiction, sous la dépendance des liens bidirectionnels entre comportement et neurobiologie
AD : Comment devient-on addict ? Laurent Karila : Dans la valse complexe des facteurs prédisposants à l'addiction, cinq grands acteurs entrent en scène, interagissant dans une chorégraphie aussi précise que perturbante. D'abord, les facteurs de développement personnel, une phase de la vie où tout s'accélère : la puberté, les changements hormonaux, la maturation cérébrale, avec ses nuances distinctes chez les garçons et les filles. C'est une période charnière, qui dessine les premiers contours de notre rapport au monde. Ensuite, les facteurs psychologiques et psychiatriques entrent en jeu, tempérant notre personnalité. Qu'il s'agisse d'une propension à la dépression durant l'adolescence, de troubles oppositionnels ou de déficits de l'attention, ces aspects façonnent notre tempérament, notre manière d'être au monde. Sommes-nous des adeptes du risque ou des prudents ? Cette sensibilité, cette réactivité émotionnelle, constitue le second fil de cette trame complexe. Le troisième fil, c'est le cerveau, avec son incroyable plasticité, ses réseaux de neurones qui s'entremêlent en une danse métabolique d'oxygène et de glucose. Cette machinerie biologique évolue, s'adapte, se modèle au gré des expériences, jusqu'à l'âge de 25 ans où elle atteint sa pleine maturité. Le quatrième facteur, génétique, nous rappelle notre héritage familial. Les antécédents d'addiction ou de troubles mentaux ne dictent pas notre destin, mais ils pèsent dans la balance, expliquant une part significative de notre vulnérabilité.Au-delà de l'addiction: l'impact de l'environnement sur nos choix et nos vies
Enfin, le cinquième et dernier acteur, c'est l'environnement. Un facteur d'une influence majeure, car c'est lui qui orchestre la disponibilité des substances, qui façonne nos interactions sociales, nos pressions, nos stress. Cependant, aucun de ces facteurs ne saurait à lui seul composer la mélodie de l'addiction. C'est leur déséquilibre concerté qui crée la tempête parfaite pour le développement de la maladie. Dans mon livre, je m'efforce de décrypter cet entrelacs, de montrer comment chaque fil peut se tendre, s'affaiblir ou se rompre. J'explore la manière dont notre environnement, loin d'être un simple décor, est un acteur de premier plan, influençant nos comportements, nos choix, nos expositions précoces à des substances ou à des pratiques à risque. Parler d'addiction positive, c'est introduire une nuance dans un tableau souvent peint en noir. C'est reconnaître que certains comportements addictifs peuvent avoir des répercussions bénéfiques, dans certaines circonstances. Mais ne nous y trompons pas : les addictions pathologiques sont là, bien présentes, et elles réclament toute notre attention, notre compréhension et notre engagement. Car au-delà des mots, c'est de vies humaines dont il est question, de souffrance et de la quête de guérison.Des facteurs environnementaux
AD : Comment l'environnement influencent-ils effectivement ces comportements ? Laurent Karila : Les facteurs environnementaux sont multiples : la disponibilité des drogues, de l'alcool, du tabac, mais aussi les comportements induits par l'accès presque illimité à internet. Ce sont des éléments qui s'insinuent dans le quotidien, modelant subrepticement nos habitudes et, parfois, nos dépendances. Mais allons plus loin. Notre éducation, celle que nous recevons de nos parents et des institutions, joue un rôle non négligeable. La tolérance, ou à l'inverse, la rigueur avec laquelle nos parents répondent à nos comportements, trace des lignes directrices, parfois des frontières floues, qui vont orienter nos choix. Et notons-le bien : le milieu socio-économique n'est pas un bouclier infaillible. Que l'on provienne d'un milieu précaire ou aisé, les pièges de la consommation sont là, insidieux, souvent masqués par des justifications culturelles ou des rites sociaux. De même, le stress environnemental, ce bruit de fond constant de notre société moderne, exerce une pression ininterrompue sur nos psychismes, parfois jusqu'à la rupture.Les cinq symptômes alertant d'addiction
AD : Dans votre livre, vous distinguez entre ce que l'on pourrait appeler des addictions "positives", des passions dévorantes mais structurantes, et les addictions pathologiques, celles qui nous entravent, qui sclérosent nos vies. Laurent Karila : En se penchant sur la complexe tapisserie qu'est l'addiction, nous découvrons cinq fils conducteurs, cinq symptômes qui, tels des signaux, nous alertent sur l'état de notre relation aux substances ou aux comportements addictifs. Le premier, c'est cette perte de contrôle sur nos actes, une main invisible qui guide nos comportements malgré nous. Le deuxième, c'est l'usage compulsif, cette impulsion irrépressible qui nous pousse à consommer. Ensuite, le troisième, le 'craving', un terme anglais qui traduit cette envie pressante, presque physique, de s'adonner à la substance ou à l'activité en question. Le quatrième fil rouge, c'est la consommation chronique, un rituel répétitif, presque ancré dans le quotidien. Et le dernier, mais non le moindre, ce sont les répercussions, souvent sournoises, qui s'infiltrent et s'immiscent dans notre vie sociale, physique, psychique. Si ces cinq symptômes persistent sur une période de douze mois, alors, mes chers auditeurs, nous parlons d'addiction, d'une maladie à part entière.L'addiction positive
Mais abordons un concept qui peut paraître contradictoire au premier abord : l'addiction positive. C'est un terme que j'ai forgé en observant les comportements au sein de la communauté métal, et en me remettant en question moi-même. Nous avons des comportements qui pourraient être qualifiés d'addictifs, certes, mais qui ne basculent pas dans la maladie. Alors, qu'est-ce donc que l'addiction positive ? Je l'ai redéfinie comme une expérience enrichie par le plaisir, la passion, la récompense et des émotions positives. Il y a cette dimension, aussi, que l'on retrouve dans la passion amoureuse non pathologique, où le manque de l'autre et le désir ardent de le revoir deviennent presque poétiques.Le craving
Le craving, ce symptôme central de la maladie addictive, se manifeste ici sous une forme atténuée, un pseudo-craving. On a trop souvent tendance à dire : "Tu es addict à ceci, addict à cela." Mais non, ce n'est pas si simple. Si le manque est là, si ce petit craving pointe le bout de son nez, mais que les cinq critères ne sont pas tous présents sur une période de douze mois, alors non, nous ne sommes pas face à une maladie. C'est cette nuance que je cherche à explorer, à dépeindre avec la plus grande précision, pour distinguer la maladie de l'expérience purement humaine du désir et du plaisir.Travailler en équipe: le rôle clé des professionnels dans la rémission de l'addiction
AD : Comment guérir de son addiction ? Laurent Karila : On ne parle pas ici de guérison au sens classique du terme, mais plutôt d'un état de rémission, un armistice avec soi-même. Prenons un exemple concret : vous êtes à une soirée. Pour cet exemple, imaginez-vous dépendant à l'alcool et à la cocaïne. Vous consommez, beaucoup, trop. Le retour à la réalité est brutal, inconfortable. Si vous êtes pris en charge à ce moment-là, on peut dire que vous avez "guéri" de cet épisode, mais le mot-clé, le vrai, c'est la rémission. C'est cette rémission que nous cherchons à maintenir, à étendre le plus possible dans le temps, en trouvant des stratégies alternatives pour ne plus consommer. Et quand on parle de rémission à long terme, quelle stratégie spécifique recommander ? Le travail se fait en équipe, avec des professionnels spécialisés. Le médecin généraliste, figure centrale, oriente le patient vers un centre d'addictologie, que ce soit en ville ou à l'hôpital, avec des consultations adaptées. Et là, le travail se déploie en multimodalité : plusieurs acteurs interviennent. On a le psychiatre addictologue, qui orchestre la prise en charge, l'infirmier ou l'infirmière spécialisé(e) qui va attiser la motivation, le psychologue clinicien qui, j'insiste sur ce terme, clinicien, va explorer les racines profondes du problème. C'est dans cette approche globale, cette vision d'ensemble, que l'on trouve la clé pour maintenir la rémission et prévenir les rechutes. Car c'est bien d'une chorégraphie qu'il s'agit, où chaque pas, chaque geste, chaque note jouée par ces professionnels dévoués, contribue à la symphonie de la guérison.Comment prévenir les rechutes ?
AD : En parlant de la rémission à long terme, quelles stratégies spécifiques recommandez-vous pour maintenir la guérison et prévenir les rechutes ? Laurent Karila : La lutte contre l'addiction, mes chers auditeurs, est un combat qui se mène de front avec une armée de professionnels. Au cœur de ce dispositif, nous avons le médecin généraliste. C'est lui, l'acteur central, qui tient le gouvernail et dirige les patients vers le port sûr des centres d'addictologie. Ces havres de soins se trouvent partout : en ville, à l'hôpital, sous la forme de consultations adaptées pour les jeunes consommateurs, et ainsi de suite. Une fois le cap fixé, la prise en charge se déploie en multimodalité. C'est un terme qui pourrait paraître technique, mais qui traduit en réalité une véritable orchestration de compétences. Le psychiatre addictologue y joue le rôle de chef d'orchestre, veillant à ce que chaque note, chaque intervention, s'accorde harmonieusement au processus de guérison. Les infirmiers et infirmières spécialisés en addictologie sont là pour entretenir la flamme de la motivation, tandis que les psychologues cliniciens plongent dans les racines parfois tortueuses du problème. Mais la partition ne s'arrête pas là. Elle inclut également des assistantes sociales pour les écueils sociaux, des ergothérapeutes pour réapprendre le mouvement, la coordination, et même des professionnels pour encourager l'activité physique. Oui, vous l'avez compris, c'est un programme sur le long terme, un engagement de tous les instants. Et puis, il y a cette notion de passion, celle qui peut animer un patient à suivre assidûment le chemin de la consultation. Je le dis souvent, et je le répète : nous sommes partis pour une année, au moins, pour stabiliser la situation. Mais ce "nous" est pluriel, inclusif, car dans cette lutte, personne n'est seul. Nous sommes là, présents, déterminés, pour accompagner chaque étape, chaque petit progrès vers la lumière de la rémission. AD : Vous avez souligné que nous sommes tous susceptibles de développer des addictions, mais avec des niveaux de risque différents. Quels sont les principaux facteurs qui déterminent cette susceptibilité et comment peut-on les atténuer ? Laurent Karila : Pour s'attaquer à la racine de l'addiction, il faut une information et une sensibilisation claire et ferme. Les produits, les comportements, tout est à portée de clic, notamment grâce à Internet. C'est un constat qui appelle à une régulation rigoureuse. Et puis, il y a l'éducation, cette première barrière qui, lorsqu'elle flanche, peut ouvrir la porte à bien des excès. Pensons aux parents qui, par naïveté ou par ignorance, se félicitent de voir leur enfant ivre. C'est une erreur, un faux pas à mon sens. Donner un fond de verre d'alcool à un enfant de neuf ans lors d'un baptême, d'une bar-mitzvah, c'est aussi dommageable pour son développement que lui offrir une ligne de cocaïne. Quant au cerveau, si nous ne pouvons pas intervenir directement sur sa constitution, nous pouvons agir préventivement, ne pas trop exposer, discuter, repérer les problèmes à temps. Concernant la génétique, bien que nous ne puissions l'altérer, nous devrions encourager les pratiques qui retardent l'exposition aux substances addictives. Par exemple, la génération de nos parents buvait un verre de vin à la cantine, chose impensable aujourd'hui, où l'on voit des adolescents invités à consommer de l'alcool en famille. À l'aune de ces pratiques, il faut que les familles prennent conscience de l'inutilité, voire du danger, de faire goûter de l'alcool aux plus jeunes sous prétexte de culture ou de tradition. Ils auront tout le temps pour cela plus tard, si tant est qu'ils choisissent de le faire.Lien entre les troubles du sommeil et la dépendance
AD : Quel est le lien entre le sommeil, la consommation de substances et l'addiction ? Laurent Karila : Ce lien est bidirectionnel. Des troubles du sommeil peuvent conduire à la consommation de substances dans une vaine tentative de régulation, et inversement, la consommation de substances peut induire des troubles du sommeil. Boire plusieurs verres de vin peut perturber la deuxième partie de votre nuit de sommeil en raison de la déshydratation et d'un sommeil de mauvaise qualité. AD : Alors il y a les addictions à l’alimentation, à l’alcool au travail, aux sexes, à l’amour, et aux écrans, quels sont selon vous les addictions que notre société entretien le mieux ? Laurent Karila : Quant aux addictions qui semblent les mieux entretenues par notre société, c'est un vaste sujet. Le tabac, l'alcool, le sucre, et tout ce qui concerne les réseaux sociaux et notre smartphone, sont des candidats évidents. La conception même de nos appareils et applications est faite pour renforcer cette addiction aux écrans.Les dangers de l'addiction aux écrans
AD : Quid des addictions derrières les écrans ? Pour les enfants et les jeunes, c'est d'autant plus préoccupant qu'ils sont exposés très tôt à ces technologies. Il est crucial de comprendre que l'addiction aux écrans n'est pas due à l'écran en lui-même, mais plutôt aux comportements qu'il facilite, comme la sexualité en ligne, les jeux d'argent, les jeux vidéo, etc. Le smartphone est comme un doudou moderne, un objet de réconfort pour tous, du plus petit au plus grand. Ce besoin de réconfort peut parfois être lié à des moments difficiles à surmonter, comme évoqué dans l'article sur comment rebondir après une épreuve difficile , qui aborde les différentes stratégies pour gérer ces périodes de vulnérabilité.. La question est donc de savoir comment réguler cet usage problématique. Il est recommandé de faire des pauses régulières dans l'utilisation du smartphone au cours de la journée, de désactiver les notifications pour éviter les distractions, et d'éviter l'utilisation de tout écran au moins une heure avant le coucher, pour ne pas perturber la sécrétion de mélatonine et la qualité du sommeil. Ces conseils sont d'autant plus importants à une époque où les écrans font partie intégrante de l'éducation et du travail. Il est essentiel de distinguer l'usage professionnel de l'usage ludique des écrans et de se concentrer particulièrement sur ce dernier pour prévenir les usages problématiques.Des comportements anti-sociaux
Nous vivons dans une ère où le smartphone est devenu presque une extension de notre être. Chacun de nous, ou presque, possède ce petit rectangle qui nous connecte au reste du monde à travers un ou plusieurs réseaux sociaux. Au départ, tout semble positif : la communication, le partage, l'accès à l'information. Mais certains dérapent, emportés par une vague de vulnérabilité qui les fait sombrer dans un usage excessif, problématique, mais pas nécessairement dans une addiction. Encore une fois, il ne s'agit pas de pathologie pour la plupart d'entre nous. Pourtant, il y a des comportements antisociaux, comme le phubbing, cette fâcheuse habitude de consulter son téléphone en pleine conversation. Et que dire des risques encourus par ceux qui répondent à leurs notifications en conduisant ? Le danger d'accident est alors démultiplié. Nous sommes aussi confrontés à l'usage problématique des écrans dans le cadre éducatif. Il est essentiel de distinguer l'écran pédagogique de l'écran de loisir. Ce n'est pas le temps passé devant l'écran qui est le plus préoccupant, mais plutôt la qualité de ce temps et ce qui se passe autour, particulièrement pour les jeunes. Quel est le contexte de leur connexion ? Le contenu ? Leur état d'esprit avant, pendant, et après cette exposition ? J'ai rencontré ce matin une patiente qui travaille exclusivement sur son smartphone. Elle m'a confié que, bien que son travail sur écran se termine à 19h, elle passe ensuite des heures dans un usage personnel non structuré, naviguant d'une application à l'autre jusqu'à 2h30 du matin. C'est cette habitude qu'il faut réformer.Comment mieux gérer sa consommation digitale ?
La solution ? Introduire des pauses dans l'usage du smartphone durant la journée, désactiver les notifications distrayantes et, surtout, établir un rituel le soir où le smartphone est mis de côté au moins une heure avant de se coucher. La lumière bleue des écrans perturbe notre horloge biologique, et s'y exposer en cas d'insomnie ne fait que renforcer le trouble du sommeil. Il est temps de revoir nos habitudes, de nous adapter à cette société hyperconnectée sans en devenir les esclaves. Il est important d'apprendre à gérer notre consommation digitale pour préserver notre bien-être mental et physique.La promesse des psychédéliques en thérapie
AD : Passons maintenant à un sujet souvent mal compris et entouré de mystère : les psychédéliques. Ces substances ont une longue histoire, et leur utilisation en médecine est aussi fascinante qu'elle est complexe. Laurent Karila : Les psychédéliques, mes chers auditeurs, voilà bien le traitement de demain. Dans mon livre, j'ai consacré un chapitre entier à ces substances qui ouvrent, pourrait-on dire, de nouveaux horizons dans le domaine de la santé mentale. C'est une histoire formidable qui commence dans les années 50, 60, quand des substances comme le LSD étaient explorées en tant que traitements potentiels pour diverses pathologies. Oui, vous avez bien entendu, des traitements médicaux. À cette époque, c'était une véritable révolution dans les milieux psychiatriques, malgré quelques dérives, car oui, ces substances entraînaient des états de conscience modifiés. Puis est venue l'ère des hippies, des Beatles, des Rolling Stones, où ces mêmes substances ont été consommées pour 'voyager', ce qui a finalement conduit à leur interdiction. On a mis un frein à toutes ces recherches, principalement à cause de l'association des psychédéliques avec la drogue et l'addiction.Des résultats encourageants
Mais aujourd'hui, il y a un regain d'intérêt. La science nous montre que les psychédéliques pourraient être des alliés dans le traitement de maladies résistantes aux thérapies classiques. Les études d'imagerie cérébrale révèlent des effets surprenants dans le traitement de la dépression, une maladie aussi grave que les troubles cardiaques, qui peut s'avérer mortelle. Quand les antidépresseurs traditionnels échouent, les psychédéliques, utilisés avec parcimonie et toujours accompagnés d'une psychothérapie, montrent des résultats prometteurs. Dans des pathologies comme l'anxiété sévère, le trouble obsessionnel compulsif, ou chez les patients en fin de vie, les psychédéliques ouvrent des portes, apportent une aide, une lueur d'espoir. Ils sont également à l'étude dans le traitement de certaines addictions, comme celles à l'alcool ou au tabac, et toujours, je le répète, en complément de la psychothérapie.L'usage des psychédéliques doit être encadré
Cependant, il y a des précautions à prendre. Ce n'est pas parce qu'on parle de potentiels thérapeutiques qu'on doit s'aventurer seul dans cette voie. Il y a des risques, des 'bad trips', et il faut être conscient des dangers. Les études actuelles utilisent des dosages précis, et les patients sont accompagnés par des professionnels de santé. Ce traitement, que j'appelle 'la triptyque', représente une sorte de 'reset' cérébral. Mais attention, il y a un monde entre les études contrôlées et l'expérimentation isolée et non régulée. Les incidents, les accidents liés aux psychédéliques, bien que rares, existent et ne doivent pas être sous-estimés. Il est important de le dire : l'usage des psychédéliques doit être encadré, dans un contexte de soin, et non en autonomie. C'est la psychothérapie assistée par psychédéliques qui est en étude, pas la consommation en solitaire. Et c'est dans cette distinction que réside la différence entre un potentiel thérapeutique et une aventure risquée.abonnez-vous gratuitement
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Publié le 26/02/2024, mis à jour le 05/11/2024