Diana Beresford-Kroeger : la sauveuse d’arbres et héritière de la...
Publié le 17/05/2023, mis à jour le 30/10/2024
Conseils écologiques
Diana Beresford-Kroeger : la sauveuse d’arbres et héritière de la tradition celtique
7 min de lecture
Qui est Diana Berseford-Kroeger, la sauveuse d’arbres?
Une héritière de la tradition celtique
Il est des vies qui ressemblent à des romans d’aventure où tout est intensité. Les amours, les malheurs, les vocations. Il en va ainsi de la vie de Diana Beresford-Kroeger.
Née en 1944, enfant d’une lignée d’aristocrates irlandais et anglais, la petite Diana se retrouve orpheline à l’âge de 13 ans.
Elle est recueillie par un oncle, un grand esprit totalement étranger aux besoins du corps. Il oublie ainsi de la nourrir (comme il oublie lui-même de manger) mais se passionne pour ses cours d’école et ses lectures.
Chaque été, l’adolescente file à Lisheens dans la campagne irlandaise, là où se trouve la demeure maternelle et une communauté d’octogénaires investies d’un savoir ancestral celtique.
D’un commun accord, les membres de cette communauté décident d’initier Diana à ce savoir. Et c’est à leur contact, couplé à celui de la nature et des animaux, que l’adolescente fait son deuil et se construit.
Dans la tradition celtique, les arbres sont des êtres sensibles et les amis sacrés de l’Homme. Leur importance est telle qu’ils se trouvent au cœur de l’ogham, l’alphabet celtique.
La légende raconte que cet alphabet a été dicté par l’univers sous forme de chant à un jeune homme nommé Ogma. Un chant que nous pouvons tous entendre si nous prenons le temps de ressentir la dance des rayons du soleil sur notre peau.
L’ogham contient 22 lettres dont chacune fait référence à un arbre. Par exemple, la lettre A désigne Ailm, le pin. La lettre B, Beith, le bouleau. La lettre C, Coll, le noisetier. Ou encore la lettre D renvoie au Dair, le chêne.
Élève brillante, Diana Beresford-Kroeger s’engage dans un double cursus universitaire de médecine et de botanique. Des études qui confortent son savoir celtique.
Une botaniste renommée
Si les Celtes ont voué un culte aux arbres, c’est parce qu’ils ont compris leurs formidables pouvoirs curatifs.
Bon nombre de remèdes druidiques ont disparu en même temps que les forêts irlandaises (abattues par les Anglais pour construire leurs navires et zapper la culture celte) mais certains demeurent.
Ainsi, les druides prescrivaient de marcher dans une forêt de pins pour soutenir l’appareil respiratoire et débarrasser les poumons des toxines accumulées par les rhumes et les grippes.
Les bienfais de ces bains de forêt sont aujourd’hui avérés. Les aiguilles du pin produisent des aérosols atmosphériques à base de pinène. Or, il a été prouvé que cette molécule s’aborde facilement par la peau et stimule le système immunitaire pendant 1 mois.
Pour revenir à Diana Beresford, les opportunités universitaires (mais aussi la prédiction d’une voyante de la communauté de Lisheens) la conduisent à s’expatrier aux États-Unis puis au Canada.
Elle achète des terres où elle construit un vaste arboretum. Son objectif étant d’y planter toutes les espèces d’arbres possibles, notamment les plus rares.
Ses connaissances en botanique et médecine sont complétées par un doctorat en chirurgie générale et en biologie (obtenu pour ce dernier à plus de 70 ans).
Engagée, elle publie de nombreux ouvrages à destination du grand public. Elle est sollicitée en tant que conseillère scientifique auprès de multiples ONG et a reçu plusieurs prix et titres de reconnaissance.
Son dernier ouvrage, La voix des arbres (éditions Tana) est à la fois une autobiographie, une déclaration d’amour aux arbres et la démonstration que notre destin est lié à eux.
Comment notre destin est-il lié à celui des arbres?
Ce que le monde doit aux arbres-mères
Pour un œil humain non averti, tous les arbres d’une forêt se ressemblent. Mais pour un œil d’expert, certains arbres se distinguent des autres.
Ce sont les plus imposants. Auprès d’eux, la vie végétale et animale est plus importante, les lichens plus abondants et l’odeur de l’humus plus forte. Ce sont les signes de la force, de la vitalité et de la fécondité de ces arbres.
De tels arbres sont l’épicentre de la forêt et Diana Beresford-Kroeger les surnomme les arbres-mères.
Ce surnom se justifie au regard de leur nombreuses responsabilités:
Ils fournissent tous les aminés essentiels, les acides gras essentiels, protéines végétales et sucres complexes dont se nourrissent le monde naturel et animal.
Ils protègent le sol où sont liées les plantes en produisant un arsenal de composés allélochimiques.
Ils soignent et protègent tous ceux dont ils sont responsables en diffusant dans l’air des aérosols incitatifs ou dissuasifs (en éloignant les prédateurs).
Sans les arbres-mères aucune forêt n’aurait vu le jour.
Mais l’influence des arbres-mères ne se limitent pas aux forêts, ils impactent également aussi les océans.
Les feuilles des arbres-mères se décomposent durant l’automne et libèrent de l’acide fulvique. Ce composant d’humus se lie au fer et se dirige vers l’océan. Là, le fer transporté nourrit le phytoplancton, le premier maillon de la chaîne alimentaire du milieu marin.
Un proverbe japonais résume ce processus: «si tu veux attraper un poisson, plante un arbre.»
Cette information est fondamentale, car le déboisement excessif peut conduire à vider les océans en affamant les créatures aquatiques.
Il n’y a qu’un petit pas pour dire que les arbres-mère sont nos mères à tous. D’autant plus que sans les arbres, il n’y aurait pas eu d’espèce humaine.
Ce que l’humanité doit aux arbres
Les bienfaits de la nature sur la santé sont aujourd’hui bien documentés et connus du grand public.
Mais saviez-vous que notre existence aurait été impossible sans la contribution des arbres?
Au tout départ, vivaient les organismes unicellulaires puis sont venus les premiers organismes pluricellulaires, les algues. S’en sont suivis les champignons, les mousses, les fougères, les plantes sempervirentes (celles qui gardent leurs feuilles toute l’année comme le cyprès, le sequoia, la chèvrefeuille). Et enfin les arbres et les plantes à fleurs dont la biologie est aussi complexe que la nôtre.
Du temps où les fougères étaient l’espèce la plus évoluée, l’atmosphère était trop chargée en dioxyde de carbone. Nous n’aurions pas pu respirer mais seulement suffoquer.
Pendant 300 millions d’années, les fougères, et à leur suite la liste de végétaux citée plus haut, ont oxygéné l’air réunissant les conditions pour rendre possible la vie humaine.
Pour résumer simplement les choses, sans végétaux et sans arbres (les plus productifs pour créer de l’oxygène) pas d’oxygène. C’est pour cela que les arbres sont nos poumons collectifs et que la déforestation effrénée n’est pas seulement une catastrophe. C’est aussi un suicide.
Plutôt que de couper les arbres nous devrions plutôt faire naître des forêts. Non seulement notre oxygène serait sécurisé, mais nous pourrions également agir efficacement sur le changement climatique.
Comment les arbres dessinent l’avenir de l’Homme?
Le défi du changement climatique
Face aux défis environnementaux et alimentaires induits par le changement climatique, Diana Beresford préconise deux solutions.
La première solution est d’arrêter la déforestation et, en parallèle, de reboiser 48 milliards d’arbre, soit 6 arbres par habitant de la terre.
L’idée de Diane Beresford est simple:
«L’ajout de ces merveilleuses machines moléculaires, qui tirent du carbone de notre atmosphère, le fixent dans leur bois et rejettent de l’oxygène. Cela mettrait un coup d’arrêt à la hausse des températures mondiales, qui se trouveraient ramenées à un niveau gérable.»
La seconde solution est de se faire une raison. L’Homme ne cessera de déboiser que lorsqu’il se sentira réellement en danger. D’ici là, il est urgent de se concentrer sur les arbres et les cultures vivrières les mieux adaptés aux températures extrêmes.
Pour ce faire, on étudie le point de flétrissement précis de chaque espèce. Le point de flétrissement détermine la température limite sous laquelle la plante peut survivre. Ainsi les petits pois peuvent pousser sous -9° mais pas -10°.
Les plantes capables de survivre dans des conditions extrêmes produisent de la gibbérelline, une phyto-hormone de croissance équivalente à l’hormone androgène chez nous.
Et bonne nouvelle, en croisant ces plantes extrafortes avec des espèces plus fragiles, ces dernières gagnent en vigueur.
Dans les années à venir, il est possible que d’autres solutions émergent et que les arbres continuent de jouer un rôle important.
Questions ouvertes sur l’avenir
Les arbres sont loin de nous avoir dévoilé tous leurs mystères et la communauté scientifique s’interroge encore sur leur potentiel et leur fonctionnement.
Parmi les questions qui restent ouvertes, citons:
Au regard des nombreuses substances médicinales découvertes sur les écorces, les feuilles ou les racines, quelles sont les autre substances encore ignorées à ce jour?
Comment les plantes et les arbres arrivent-ils à défier les lois de la gravité pour forcer l’eau à couler vers le sommet d’un arbre? Quelles innovations humaines découleront de cette découverte?
Quelle est la vraie nature des arbres? Sont-ils capables de rêver et de penser comme nous?
Cette dernière question divise la communauté scientifique. Les partisans des arbres penseurs (Diane Beresford comprise) s’appuient sur le fait que les arbres contiennent tous les composants nécessaires pour développer une activité neuronale similaire à celle de notre cerveau.
L’idée est incontestablement séduisante et bouleverse radicalement nos paradigmes, mais elle ne fait pas consensus. Des études doivent être poursuivies.
Et quand bien même les arbres ne seraient pas nos miroirs, «nos frères», ils ne perdraient en rien leur valeur. Ils resteraient des êtres vivants passionnants auxquels nos destins sont liés.
Du point de vue celtique, les arbres ont une conscience. Et même si celle-ci diffère de la nôtre en degré ou en intensité, elle existe et nous pouvons être capables de la ressentir.
Comment ressentir la conscience d’un arbre ?
Dans la pensée celtique, les arbres ont une sensibilité et sont doués d’une conscience. Pour la percevoir, ils préconisaient d’aller rendre visite aux arbres la nuit ou après une copieuse averse.
Ils estimaient également que certaines personnes étaient plus dotées de mothaitheacht que d’autres. Un terme celtique pour désigner la sensibilité à la conscience des arbres.
La personne capable de mothaitheacht ressent au contact de l’arbre une énergie ou un son qui lui traverse la poitrine.
Cette théorie celtique pourrait avoir un socle scientifique.
Il a été récemment démontré que les plantes (mais aussi les éléphants et les volcans) émettaient des infrasons pouvant se diffuser sur de larges distances.
Ces infrasons peuvent même être interprétés.
Une étude israélienne a ainsi pu identifier différents sons chez les plantes. Parmi eux, des sons spécifiques de détresse et de stress quand elles étaient déshydratées ou qu’une de leur branche était coupée. Ce qui a fait dire aux scientifiques que les plantes pouvaient pleurer.
Nul doute que vous n’oublierez plus d’arroser vos plantes… Et que, peut-être, vous regarderez les arbres avec un œil émerveillé renouvelé.
Source: Diana Beresford-Kroeger, La voix des arbres, Tana éditions, 2023
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