Une pratique efficace, et qui ne coûte rien hormis 5 minutes de votre temps. Mais qui peut être aussi terriblement gênante et angoissante pour beaucoup de gens.
Pourquoi cette fuite systématique ? Parce que le véritable but de la pleine conscience n’est pas de nous offrir un état de paix, mais de nous éclairer sur notre véritable état intérieur. Or, il n’est jamais agréable de se confronter à son mal-être enfoui, ou toucher du doigt son vide intérieur, aussi appelé vide affectif.
Le vide en soi, nous l’avons tous vécu d’une façon ou d’une autre. C’est une sensation de néant et de trou dans le ventre suite à une rupture de quelle que nature qu’elle soit.
Ce vide est naturel, il est le témoin de notre tristesse parce qu’un lien a été rompu. Mais il ne dure jamais longtemps et le ressentir est même sain. Là, où le vide devient toxique, c’est quand il pose ses valises au creux de notre ventre pour un temps indéterminé.
Du rejet et de l’abandon ou des liens brisés
Le vide intérieur prend racine dans l’enfance quand on a été sujet au rejet ou à l’abandon par ses parents, et qu’aucun adulte dans l’entourage de l’enfant n’a pu combler les carences affectives et conjurer son impact émotionnel.Trop souvent confondus, le rejet et l’abandon expriment deux situations différentes.Un enfant rejeté est celui qui a eu des parents négligents ou immatures. Ils n’ont pas su répondre à ses besoins fondamentaux : du soin, de la sécurité et de l’attention. Au point que l’enfant en vient à se demander, tôt ou tard, pourquoi il existe puisqu’il dérange tellement. Ce sentiment d’illégitimité l’accompagne jusque dans sa vie d’adulte.Pour ce qui est de l’enfant abandonné, c’est celui qui a perdu un parent, qui n’a pas été reconnu à la naissance ou qui a grandi dans un contexte familial violent, abusif et destructeur. Le sentiment d’illégitimité va être renforcé par cette impression de ne compter pour personne, et de ne pas avoir sa place.Précisons immédiatement que tous les adultes qui ont ce vide intérieur n’ont pas forcément été rejetés ou abandonnés factuellement. Toutefois, ils ont vécu dans leur enfance une situation où ils ont eu ce sentiment. Par exemple, un petit de 2 ans de parents divorcés va ressentir l’abandon du père quand il est déposé chez sa mère. Et inversement quand celle-ci le dépose devant le palier de la maison paternelle. Cet abandon n’est pas réel, mais il est perçu comme tel par l’enfant.De plus, pour notre cerveau, que le sentiment provienne d’une réalité ou d’une projection, cela ne fait aucune différence.Si, à l’âge adulte, on ne se préoccupe pas de ses troubles affectifs hérités des
blessures d’enfance on développe à son insu des stratégies d’évitement qui vont venir polluer notre mental et notre relation au monde.
Les différentes stratégies d’évitement
L’ULTRA-AFFECTIF
Pour combler son vide, la personne fait tout pour se faire accepter et aimer des autres, peu importe ce qui lui en coûte en termes de temps et d’investissement.
L’ULTRA-MÉFIANT
L’opposé de l’ultra-affectif. La personne est convaincue que toute relation ne peut que se solder par une trahison. Elle préfère une solitude confortable et bien remplie d’activités pour naturellement éviter de se confronter à son mal-être.
L’ULTRA-FLIC
La personne veut bien vivre avec ses semblables mais à condition de les avoir sous son contrôle. Quitte à les manipuler, pour être sûre de ne pas revivre la souffrance d’être rejetée ou abandonnée. La première compagne de vie d’un ultra-flic est
sa peur .
L’ULTRA-OTAGE
Plus que les autres, la personne est prisonnière de son passé. Ses choix, et en particulier dans ses relations amoureuses, l’amènent à revivre des situations d’abandon ou de rejet avec ses partenaires sans se rendre compte que c’est uniquement pour renforcer ses propres croyances. A savoir qu’elle n’a aucune valeur. L’ultra-otage vit dans la culpabilité et la victimisation. Une attitude qui débouche sur la dépression, le dénigrement de soi, et très souvent des problèmes de santé.
L’ULTRA-GUERRIER
La personne souffre, mais ne fait cas de rien. Elle se blinde, et se lance à corps perdu dans une activité intense (cela peut être sa carrière professionnelle ou des séances de sport de 3h par jour). Ce qui l’anime par-dessus tout, c’est une soif de revanche. Un réflexe de survie salvateur, mais qui, sous l’emprise de la colère, conduit rarement à un vrai épanouissement personnel.Quoiqu’il arrive, ces états d’esprit sont le signe d’un manque affectif. Un autre nom pour désigner le vide. Alors comment y remédier ? En faisant de son bonheur sa responsabilité intime et une
tabula rasa de son passé.
Comment combler le vide intérieur ?
Devenir son propre parent
La première clé pour combler un vide affectif est tout simplement de le remplir.De quoi ? De ce qui a manqué dans l’enfance, et qui fait défaut jusque dans la vie d’adulte : l’écoute de ses besoins.Avoir besoin de se faire aimer à tout prix, de se comparer, de fuir les relations cache toujours d’autres besoins primaires : l’amour, l’attention, la reconnaissance. Ce sont des soins et des besoins que nous n’avons pas eus enfant. Il va donc falloir se les donner soi-même, et devenir son propre parent pour sortir de la dépendance affective.En prenant en charge ses besoins et ses propres soins dans le maximum du possible, on reprend le contrôle et le pouvoir sur sa vie. Ainsi, on peut apprivoiser les moments de solitude où nous nous faisons tout simplement du bien (un repas qu’on adore, un bain, un film). Mais la prise de pouvoir ne peut être complète qu’à la condition de se réapproprier
son expérience passée. Mais avant d’aborder ce dernier chapitre, évoquons le cas particulier des abandonniques, ceux qui ont la névrose d’abandon.
Zoom sur les abandonniques
La névrose d’abandon est un état où la personne est tellement effrayée qu’elle agit de façon irrationnelle et disproportionnée. L’abandonnique ne vit effectivement pas un vide mais un gouffre affectif. Et cela se répercute dans ses relations, car le comportement d’un abandonnique est excessif. Vous lui faites un sourire, il vous admire. Vous lui faites un reproche, il vous maudit. En ce sens, les abandonniques sont de grands adeptes de la passion amoureuse dévorante.Mais il n’y a rien de sain, leur premier filtre étant la peur, les abandonniques vivent souvent repliés sur leurs angoisses et leur vie. Ce n’est pas de l’égoïsme primaire, mais une défense parce qu’ils ont reçu trop de coups.Dans ces cas, se faire aider est primordial. Parce que le mal est trop profond, et n’a plus rien à voir avec une émotion (colère, tristesse, etc.) qu’il convient de gérer ou de laisser passer.Laissons le gouffre, et revenons au vide.
Comment se réconcilier avec la vie ?
Partir en exploration
Pour combler le vide intérieur,
il n'existe pas d'astuces ou de méthodes à appliquer. C'est un travail de longue haleine qui passe d'abord par une prise en main totale de son existence en tenant compte de ses besoins. La 2nde étape va être de faire un travail sur soi et son vécu en adoptant le regard d’un observateur neutre.L’exploration de son caractère, de ses désirs et besoins, de ses comportements et fonctionnements, mais surtout des souvenirs que nous gardons de notre passé sont la clé pour sortir d’un état d’esprit mortifère. Il n’est jamais agréable de se replonger dans ses
souvenirs émotionnellement douloureux, mais il le faut, car c'est ici que se trouve des éléments de réponse pour sortir de la dépression et de la dépendance affective. Pour éviter de se laisser refroidir par la douleur, et arrêter cette exploration intérieure, il est nécessaire de mettre de côté ses projections et ses sentiments. Ce qui aide beaucoup de gens est de revisualiser la scène en tant que spectateur et non acteur, comme si vous étiez au cinéma.L’idéal également serait une conversation avec le parent « défaillant », celui qui est à l’origine de cette blessure de rejet et d’abandon. Comprendre son point de vue, et son état d’esprit de l’époque a un curieux pouvoir d’apaisement. Si le pardon n’est pas forcément au rendez-vous, la colère semble avoir plié bagage.
Ce qui a été fait peut-être défait et reconstruit
L’idée de cette (en)quête de soi est de regarder les évènements avec lucidité pour comprendre les origines des colères, des peurs et de la terrible image que l’on a soi-même.Elle permet d’importantes et salvatrices prises de conscience. Dont l’une est commune à beaucoup de gens : je n’ai pas demandé à mes parents de me faire, j’ai fait ce que j’ai pu et pas voulu parce que je n’en n’avais tout simplement pas les moyens. J’étais un enfant.En replaçant les évènements dans leur contexte, on leur donne un nouveau sens, et on comprend la suite de notre évolution. Plus important, on déniche enfin une chose nouvelle et essentielle : sa propre valeur, et donc son estime de soi-même et même sa raison d’être.Le
cerveau est malléable et nous pouvons transformer notre module mental en agissant sur notre imagination et nos pensées. Mais patience, cela ne se fait pas du jour au lendemain. C’est toujours petit à petit, que l’oiseau fait son nid.
Source : Genevière Krebs, « Combler ce vide en nous. Se défaire de tout ce qui nous empêche d’être heureux », éditions Eyrolles, 2020