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Publié le 21/07/2023, mis à jour le 14/11/2023
Connaissance de soi
Comment prendre des décisions éclairées?
Pourquoi il est difficile de prendre des bonnes décisions?
Dans la vie, mais surtout dans le monde du travail, trouver la bonne décision n’est pas toujours évident.
Les raisons sont multiples. En voici quelques-unes:
- L’incertitude quant aux conséquences de la décision.
- L’absence de règles, de consignes ou d’informations.
- Des règles allant à l’encontre de son éthique ou de ce qui nous apparaît être du simple bon sens.
- Un cadre avec des règles contradictoires (privilégier la qualité tout en réduisant les coûts et le temps de travail).
Face à ces contraintes et ces inconnues, la bonne décision s’avère être souvent hors de notre portée.
Il est plus réaliste s’atteler à prendre une décision éclairée.
La différence entre la bonne décision et la décision éclairée peut paraître insignifiante, mais elle est importante.
Rechercher à tout prix la bonne décision c’est se mettre une pression incommodante. Nous sommes tellement focalisés sur le résultat à atteindre que l’on en oublie qu’il sera la conséquence de notre réflexion.
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Comment produire un raisonnement de qualité?
Prendre conscience des différents modes de raisonnement
Un raisonnement de qualité suppose de savoir comment nous articulons nos pensées. C’est un exercice difficile tant c’est un réflexe dont nous n’avons pas conscience. Heureusement, les philosophes, et en premier lieu Aristote le père de la logique, ont décortiqué pour nous nos différents modes de raisonnement:- Le mode empirique qui repose sur notre expérience.
- Le mode intuitif qui repose sur nos ressentis.
- Le mode analytique qui dépend de notre raison et se construit en fonction de ces trois autres modes:
- Le mode déductif raisonnant à partir de vérités générales.
- Le monde inductif raisonnant à partir de situations précises.
- Le mode dialectique confrontant deux idées contradictoires pour trouver la solution idéale.
- Le raisonnement de la pente fatale qui est d’exagérer, seul dans son coin, les conséquences d’une décision.
- Le raisonnement du faux dilemme qui est un raisonnement binaire et réducteur.
S’essayer à la philosophie du Dao
De façon générale, les erreurs de jugement nous conduisent à penser la décision comme un choix entre deux alternatives et impliquant un renoncement. C’est une erreur très occidentale, de laquelle peut nous protéger la philosophie chinoise du Dao. Cette philosophie considère le monde comme un système interdépendant où tout le monde est soumis aux même flux, aux mêmes vents. Le pouvoir de ces flux ou vents étant plus grands que notre pouvoir décisionnel, les Chinois estiment qu’aucune décision ne peut changer radicalement le réel. Et pour prospérer et naviguer au mieux, la sagesse veut que nous suivions le sens du vent. En fonction de ce paradigme, prendre une décision éclairée, c’est donc accompagner le sens du vent. Sun Zi, stratège chinois et penseur du Dao, préconise trois principes pour ce faire:- Comprendre le sens du vent, c’est-à-dire comprendre la situation dans laquelle on évolue. Il faut rassembler le maximum d’informations pour avoir vision claire des enjeux et des obstacles.
- Faire l’économie des moyens. Les moyens doivent être proportionnels à l’importance de l’enjeu ou à la puissance des obstacles rencontrés.
- Délimiter sa ligne de rupture. On ne peut pas toujours être gagnant, mais on peut déjà se décider ce que nous sommes prêts à perdre avec et sans contrepartie. Et ce à quoi on ne renoncera jamais (votre ligne de rupture).
Pourquoi et comment s’appuyer sur ses émotions?
Les émotions guides ou saboteuses
Depuis les travaux d’Antonio Damasio sur les liens entre les émotions et la raison, nous savons que ces dernières sont indissociables. Et qu’un raisonnement faisant abstraction des émotions est néfaste. Les émotions sont donc indispensables, elles sont mêmes centrales au maintien des valeurs, puisque ce sont elles qui nous permettent de nous relier à ces dernières. Les émotions sont donc des guides, mais l’une d’entre elles, la peur, est bien connue pour troubler notre discernement. La peur de faire une erreur, d’être ignoré, de paraître trop passif, trop réactif etc… peut nous conduire à tordre notre raisonnement, et nous dévier du choix éclairé. Pour l’éviter, les philosophes exposent deux concepts qui ont fortement inspiré les psychologues. Le premier est le principe de double connaissance de Spinoza :- S’en tenir à sa connaissance concrète des choses extérieures. Ne pas spéculer sur l’inconnu au risque d’exciter la peur en imaginant le pire scénario.
- Être conscient de soi, c’est-à-dire de ses comportements émotionnels (la peur entraîne le besoin de contrôle).
Le contexte créé des affects
Les émotions apparaissent rarement sans contexte. Le contexte et le cadre stimulent des affects et des comportements plus ou moins heureux à la prise de décision. Vous pouvez être naturellement quelqu’un d’engagé et de coopératif, mais si l’ambiance au travail est médiocre, vous le serez beaucoup moins. Le contexte le plus handicapant étant les lieux où l’aveuglement éthique, c’est-à-dire l’absence de considération éthique, est de mise. Ce sont les endroits où les collaborateurs n’osent pas aborder les problèmes ou émettre un avis contradictoire. Où la pression quotidienne (et non pas exceptionnelle) du temps, de l’autorité et du groupe entérine la dimension éthique. Ce sont, enfin, les endroits où le turn-over est excessif. Signe évident d’un malaise structurel. L’aveuglement est conscient ou non selon s’il est dû à des biais cognitifs, un conflit d’intérêt personnel ou une pression sociale. Cela peut être aussi simplement un manque de sensibilité éthique. En tant que collaborateur, il n’y a pas grand-chose à faire. À moins de s’en référer à un conseil syndical s’il y en a un. La grande partie du travail revient aux dirigeants et aux managers. C’est à eux de refonder l’organisation et la culture d’entreprise pour que l’éthique ait sa place. Ce qui est possible au travers de l’imagination morale et du récit éthique. Le premier concept est celui d’Hannah Arendt. L’imagination morale signifie simplement d’être capable de s’imaginer à la place d’autrui. Le second est issu des travaux de la philosophe américaine Martha Nussbaum selon laquelle tous les problèmes en entreprise contiennent à la fois une dimension pratique, organisationnelle et à une dimension éthique. Une décision éclairée est une décision où ces deux angles sont abordés simultanément. Le raisonnement et la place des émotions comprises, quels sont les autres principes philosophiques permettant de se décider au mieux?Comment philosopher pour mieux décider?
Penser par soi-même et ensemble
Pour prendre une décision éclairée, deux niveaux de pensée doivent être pris en compte. La première consiste à penser par soi-même. Et pour bien penser, l’esprit critique et l’ouverture d’esprit sont de rigueur. Le second niveau est de penser bien ensemble quand la décision est collective. Ce qui requiert deux conditions, la première est que tout le monde soit sur la même longueur d’onde. La seconde est d’instaurer un cadre de décision collective. Le cadre le plus pratiqué est celui de la décision par consensus, où tout le monde approuve ce qui est considéré comme la meilleure solution. Un cadre alternatif pourrait être celui de la décision par consentement. Ici, les participants acceptent de ne pas chercher la meilleure solution, mais une décision qui respecte les limites et les besoins de ceux qui devront l’assumer. Voici les 5 principales étapes de la décision par consentement à répéter autant de fois que nécessaire.- Présentation d'une proposition de décision par un porteur de propositions.
- Chaque participant pose des questions pour s’assurer d’avoir bien compris la proposition. Il s’agit de dissiper les doutes ou une mauvaise interprétation.
- Chacun partage en quoi la proposition vient ou non satisfaire ses besoins.
- Chacun exprime s’il voit un risque majeur pour le groupe ou une limite personnelle rédhibitoire.
- Le porteur de propositions traite les objections une par une. Il explique s'il les garde ou non et pourquoi, puis bonifie sa proposition en conséquence.
- La proposition ainsi amendée est à nouveau soumise aux étapes précédentes.
L’intuition comme guide décisionnel
Faut-il suivre ou non son intuition? Olivier Sibony, professeur de stratégie à HEC nous dit de nous en méfier, car l’intuition est influencée par les biais cognitifs. Pourtant, F. Bernard et M. Genaivre contestent cette approche. Ce qui serait soumis aux biais cognitifs serait non pas l’intuition, mais l’instinct motivé par la survie, la peur, la recherche de pouvoir ou l’avidité. L’intuition, elle, ne ferait que nous guider vers ce qui a du sens. Une idée directement héritée d’Henri Bergson. Selon Bergson, l’intelligence est une photographie qui capte ce qui est à un instant T, tandis que l’intuition capte le devenir. Non pas en tant que don divinatoire, mais en tant que perception du sens vers lequel le monde se dirige. En un sens, Bergson rejoint la philosophie du Dao qui nous enjoint à saisir le sens du vent, autrement dit le mouvement du monde. Si Bergson n’a malheureusement jamais laissé une méthodologie claire et précise pour travailler l’intuition, il est possible d’en dégager une esquisse suite à ces écrits:- Analyser, dégager des principales composantes d'un problème.
- Écouter son discours intérieur et ses émotions ressenties suite l’analyse.
- Puis cesser de réfléchir plus pour laisser advenir l’intuition.
Source: Flora Bernard & Marion Genaivre, La prise de décision, Dunod, 2021
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