Pandémie Covid-19 oblige, « on nous recommande fort justement de nous laver les mains et d’éviter tout contact avec les autres, mais on oublie, semble-t-il, qu’un organisme doué d’un système immunitaire en bon état résiste mieux à l’agression de virus même extrêmement contagieux » averti l’ethnobotaniste, François Couplan.
Il est plus que jamais pertinent de connaître les clés essentielles pour votre santé. Celles capables de fortifier votre système immunitaire.
C’est toute la vocation d’Isabelle Célestin-Lhopiteau, psychologue et directrice de l’IFPPC, l’Institut Français des Pratiques Psychocorporelles. Elle est également l’auteure de l’Eloge du vivant, où elle développe le concept de médecine intégrative, l’union des médecines alternative et conventionnelle.
Six clés pour prendre sa santé en main
Formée à l’école de la médecine conventionnelle, la psychologue s’étonne de voir des patients retrouver leur bonne santé mentale ou physique après avoir pris des cours de yoga, de méditation ou avoir consulté un chaman ou quelque guérisseur chinois. Des disciplines issues de la médecine dite alternative.
L’étonnement incrédule de la psychologue laisse place à une curiosité vivace : pourquoi ces méthodes alternatives fonctionnent quand la médecine conventionnelle échoue ? Elle étudiera un bon nombre de médecines alternatives (yoga, méditation , l’hypnose, l’osthéopathie, massage, art-thérapie, le toucher relationnel, acupuncture,) et partira dans différents coins du monde, dont en Sibérie et au Bénin, pour aller à la rencontre de ces chamans et guérisseurs.
Ces recherches la conduisent à développer la conclusion suivante : en dépit de la diversité des médecines alternatives, toutes regroupent six points communs intemporels et universels. Six facteurs qui nourrissent et déploient nos forces vitales.
Les soins fondamentaux connus
Une bonne hygiène de vie
En tant que sédentaires, certaines clés pour prendre soin de notre santé sont plus connues que d’autre, comme celle d’avoir une bonne hygiène de vie pour prévenir les risques de surpoids, d’obésité, de maladies chroniques et maladies cardiovasculaires.
Pratiquer quotidiennement une activité physique régulière comme la course à pied ou la natation. Le minimum étant de bouger régulièrement (le classique : prendre les escaliers plutôt que l’ascenseur) et éviter de rester assis trop longtemps devant un écran.
Bien dormir tout aussi important que faire du sport ou bien manger. La fatigue dérègle la mécanique de notre corps, modifie nos habitudes alimentaires et donc favorise une prise de poids.
Être heureux seul, avec les autres et le monde suppose deux clés. La première est la capacité à se connecter à soi-même, aux autres et au monde. Autrement dit, à apprendre à se connaître et à déterminer quels sont ses besoins et ses désirs pour faire des choix de vie au mieux pour soi.
Etant des animaux sociaux, même pour les plus solitaires d’entre nous, nous avons besoin d’assouvir un sentiment d’appartenance. « La relation d’appartenance est un partage de valeurs, croyances, buts, intérêts qui créent une communauté réelle et ou psychologique. Cela crée une solidarité, une loyauté entre les membres ».
Cela demande également de trouver sa place dans ce monde pour y trouver du sens (en dépit de tout ce qui se passe autour de nous) et l’habiter pleinement. Le monde n’étant pas un paradis, le seul moyen de le rendre vivable (et quelque fois enchanté) est d’apporter du sens dans sa vie.
Traverser ses émotions
La seconde clé concerne les émotions. Isabelle Célestin-Lhopiteau emploie le terme de « traverser les émotions » au lieu de « gérer les émotions », ce qui est un choix plutôt pertinent. Gérer ses émotions peut mal s’interpréter. On pourrait croire qu’il s’agit de les brider ou de les contrôler, alors que l’objectif est tout l’inverse. Il s’agit de les laisser venir et s’exprimer en pleine conscience.
On doit sentir dans quelle partie du corps la douleur est présente, et savoir quel organe est relié à telle émotion. Ce n’est qu’à cette condition que l’on s’épargne des maux de cœur qui deviennent des maladies.
Toutes les médecines alternatives et ancestrales se focalisent justement sur la libération de ces émotions anciennes qui nous empoisonnent le mental. Y compris le yoga ou le qi gong dont certaines postures sont justement dédiées à l’expression de certaines émotions.
Jouer avec son esprit
Deux clés pour rester serein dans sa tête
« D’une émotion nait une pensée ». Quand l’émotion est négative (ou positive), la pensée le sera également. Une pensée qui se perpétue dans la longue durée devient une croyance. Certaines donnent des aides, d’autres nous limitent et nous font faire des choix de vie frustrants. Si on doit embrasser les émotions, il faut à l’inverse prendre une certaine distance avec ces pensées. Surtout celles qui tournent en bouche et nous rendent tristes et résignés.
L’un des meilleurs leviers consiste à passer par un état de conscience modifié pour stopper le ressassement et prendre de la distanciation avec son mental. Parmi ceux-là il y a : la relaxation, la sophrologie, la méditation de pleine conscience, le rêve lucide, l’hypnose, la méditation expérimentée, la transe chamanique et l’état extatique.
Des moines bouddhistes qui avait été torturés par la police chinoise ont pratiqué la méditation pour ne plus se laisser envahir par leurs souvenirs douloureux et leur haine. Que cela soit un lien d’amour ou de haine, dès lors que nous ressentons une émotion vivace pour quelqu’un, nous lui sommes liés. La méditation a permis aux moines d’entrer dans un état de conscience qui leur a permis de prendre du recul et de rompre le lien.
Pour accéder à un état de conscience modifié, même léger, la respiration consciente suffit à elle-seule. Et celle-ci a fait l’objet de nombreuses études qui ont confirmé ses effets bénéfiques tant sur le corps que sur l’esprit.
Que se passe-t-il dans le corps ?
L’impact d’un changement d’état de conscience apparaît d’abord dans le cerveau. Les professeurs Andrew Newberg, de l’université de Philadelphie et Richard Davidson, de l’université de Wisconsin-Madison ont sollicité des moines bouddhistes pour analyser leur cerveau pendant leur méditation. Ils ont pu constater qu’« en transe, le cerveau change de mode de fonctionnement, il est davantage tourné vers l’intérieur, moins réceptif aux stimuli extérieurs. »
Mais nous n’en sommes pas pour autant dans notre bulle. Le cerveau est relié au monde extérieur d’une façon différente : plus directe et fluide, car la connexion n’est plus encombrée par les pensées, idées préconçues ou la fatigue mentale. Ce qui permet d’établir aussi de nouvelles connexions neuronales.
Au-delà de l’activité cérébrale, les états modifiés de conscience influencent également l’expression de nos gênes. Herbert Brenson, professeur et chercheur à l’Université Harvard et son équipe a réuni 40 personnes réparties en deux groupes. Le 1er est composé de 20 personnes méditant depuis 10 ans. Le 2nd groupe rassemble ceux qui n’ont jamais médité mais qui présentent des profils psychologiques similaires aux participants du 1er groupe.
Les chercheurs ont constaté que dans le 1er groupe plus de 2000 gênes liés au stress (inflammation, cortisol, mort cellulaire etc.) étaient inactivés. Le 2nd groupe était initié à la méditation, et les chercheurs ont pu alors constater l’impact de la pratique sur une diminution de l’expression des gènes liés au stress.
Il n’y a pas que la méditation qui produit de tels effets. Une compilation de 18 études réalisées de 2005 à 2016 dans les Université d’Anvers, de Coventry et de Radboud de Nimègue ont révélé que l’expression des gènes liés au stress était aussi influencée par la pratique du yoga, du qi gong, de la relaxation et des exercices respiratoires.
Soigner sa posture
Dos droit et poitrine ouverte
« Le corps sait avant l’esprit ». Notre façon de voir, de sentir et d’appréhender le monde étant uniquement intellectuelle, on oublie d’autres intelligences, comme celle du corps. Le yoga, l’hypnose, la sophrologie, ou le qi gong nous en font prendre conscience. A tel point, que certaines postures que nous adoptons sont capables de changer notre état d’esprit.
Une étude menée en 2017 par trois chercheurs (A. Golec de Zavala, D. Lantos et D. Bowden) a regroupé 82 étudiants britanniques. Ils ont été séparés en 4 groupes et chacun avait ses propres consignes :
Le groupe 1 pratiquerait une posture de yoga d’ouverte (dos droit, poitrine ouverte).
Le groupe 2 pratiquerait une posture de yoga de fermeture
Et le groupe 3 pratique une position de conquête (poitrine bombée, jambes écartées et un pied en avant).
Le groupe 4 pratique une position de retrait (dos vouté, épaules rentrés).
A la fin du temps de pratique, les résultats ont révélé que le groupe 1 et 3 ressentaient plus d’énergie et de confiance en soi. Les chercheurs en ont conclu que c’était l’ouverture du corps vers l’extérieur qui nous aidait à doper la confiance en soi.
Ce n’est pas qu’un effet placebo. Il y a une explication toute scientifique à ce ressenti : « L’ouverture qui soulève la poitrine stimule le nerf vague. Or, plus il est sollicité plus il alimente l’action du système nerveux parasympathique ». C’est la partie du système nerveux qui déclenche les sensations de sécurité et nous aide à nous épanouir dans la joie et la sérénité. En plus d’optimiser notre sommeil et guérison.
Tout est dans le sourire
La posture peut également concerner notre visage. Le rire et le sourire contribuent à agir sur le stress, en réduisant directement la libération des hormones du stress dans le cerveau et tous les organes. C’est d’ailleurs un des secrets des centenaires. Comme le résume Isabelle Célestin-Lhopiteau : « Nous ne sourions pas seulement parce que nous sommes contents. Nous sommes contents parce que nous sourions. A condition de le faire avec sincérité. »
Résumons les six clés pour prendre soin de soi :
Maternez votre corps
Trouvez du sens à votre vie
Vivez vos émotions à fond
Entrez en transe
Respirez mieux
Et tenez-vous droit
Enfin, ces clés (fonctionnelles et sans contre-indications) sont plus que des outils pour avoir un système immunitaire en béton et d’autres bienfaits pour la santé. Ils sont aussi des repères pour mener une vie la plus sereine et la plus heureuse possible dans un monde agité et, quelque peu imprévisible. Espérons avoir quelques heureuses surprises de ce côté-là. D’ici là, prenons soin de nous.
Source : Isabelle Célestin-Lhopiteau, en collaboration avec Elsa Fayner, « Eloge du vivant », éditions Harper Collins, 2019
Pour lire cet article, abonnez-vous gratuitement ou connectez-vous